Le champion de la Terre a parlé

— BIEN JOUÉ, patron…

… Aller à Marseille se faire applaudir au congrès mondial sur les espèces en voie de disparition avec un discours vide de toute mesure concrète, c’était fortiche !

— N’est-ce pas ? J’ai répété ma promesse de l’an dernier à propos des 30 % des terres et des mers qui seraient bien­tôt protégées. J’ai annoncé un grand sommet sur l’océan, un de plus !, dans les mois qui viennent. J’ai dit que sur les pesticides « nous n’allons pas assez vite », ça leur a suffi.

— Certains ont râlé, quand même. Notamment, ceux qui ont fait remarquer que consacrer 0,25 % du plan de relance à la biodiversité, c’était certes mieux que le 0,14 % du budget national qui lui est dévolu d’ordinaire, mais que ça restait plus que maigre…

— (Énervè.) Ah oui ? Écoutez, les gars, je vais vous tenir le discours qu’attendaient de moi ces rigolos d’écolos. (Rires.) Tenez-vous bien.

Chers compatriotes, nous sommes en guerre ! Oui, en guerre !

Dessin de Vera Makina – Le Canard enchainé – 08/09/2021

Mais, cette guerre, c’est nous qui la menons. Une guerre au vivant. Vous le savez, tous les naturalistes le disent, nous sommes entrés dans une crise énorme, il faut remonter 65 millions d’années en arrière pour en trouver une semblable : la crise du vivant.

Les espèces disparaissent à une vitesse vertigineuse. Nous sommes en situation d’urgence absolue. Il faut stopper cette guerre illico. Et ce, quoi qu’il en coûte ! (Rires).

Les espèces s’entassent dans le hall des urgences, pas moins de 1 million sont en danger de mort, et des tas d’autres affluent à l’entrée de l’hôpital. Et nous les y laissons ! Alors qu’elles devraient être en soins intensifs ! Je décrète la mobilisation générale.

En France, seuls 2 % des espèces menacées font l’objet d’un plan national d’actions. Désormais, toutes seront concernées. Et les réserves naturelles ? En réalité, elles ne concernent que 1 % du territoire métropolitain, et c’est en y ajoutant la Guyane et d’immenses superficies marines du côté de l’Antarctique que j’arrive à ce chiffre faussement rassurant de 30 % d’espaces bientôt protégés. Désormais, ces 30 % s’appliqueront au territoire métropolitain !

Et les milliards de subventions publiques versés à tout ce qui tue la biodiversité, l’agriculture intensive, les énergies fossiles, Air France, etc. : arrêt immédiat !

Et le béton ?

Chaque année, on bétonne 66 000 ha, et à coups de dérogations on fait ainsi disparaître des tas d’espèces protégées : terminé, les dérogations !

Et les pesticides ?

J’arrête de tergiverser, comme je l’ai fait sur le glyphosate. Ces poisons qu’on répand inconsidérément partout, un quart en plus ces dix dernières années, sont en train de détruire ce qui constitue le socle même de la vie, les insectes, qui non seulement pollinisent à tout-va, mais aussi nourrissent de multiples autres espèces et sont le moteur du vivant. J’ordonne à tous les agriculteurs et éleveurs de passer au bio dès demain matin, carrément !

  • Ha, ha ! Alarmiste, irrationnel, utopiste et totalitaire ! Un vrai discours d’écolo, président. Tu es impayable !
  • J’oubliais : pour les chasseurs, fini les passe-droits. Ils devront désormais respecter les directives européennes.
    • Il est fou !

Jean-Luc Porquet – Le Canard Enchainé – 08/09/2021

2 réflexions sur “Le champion de la Terre a parlé

  1. bernarddominik 12/09/2021 / 13h13

    Tout ça, c’est du baratin : tant que la population mondiale continuera de croître l’espace dévolu à la nature diminuera.
    Alors, messieurs les idéalistes qui veulent tout et son contraire achetez une calculatrice et soyez réalistes.
    Tant qu’on ne ramènera pas la population mondiale à un seuil acceptable pour l’équilibre entre espaces humanités et espaces naturels, il n’y aura pas de réponse à ce problème.
    Hélas la réponse n’est pas facile, car elle implique la responsabilisation des populations qui s’accroissent le plus, et nos ONG veulent tout : le beurre et la suppression de l’espace pour faire le beurre.

  2. Danielle ROLLAT 13/09/2021 / 21h40

    Si tout l’argent consacré aux différents armements pouvaient une fois être utilisé intelligemment pour soutenir, aider, éduquer les populations abandonnées ici et là, nous aurions moins honte…
    Commençons donc par leur céder gratuitement des vaccins contre la covid, et tous traitements curatifs et préventifs…
    Exportons nos savoir faire.

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