Code du travail an II.

Plus rien à voir avec son but premier de « protection des salariés » c’est maintenant le code du bon vouloir patronal qui régné. Demain ce sera la schlague et la carotte qui rythmeront le temps de travail. MC

PSA donne à la France entière une leçon d’utilisation des ordonnances modifiant le droit du travail.

[…] … le constructeur automobile montre la réalité de l’objectif visé par les ordonnances : il s’agit moins de créer des emplois en rassurant l’employeur que d’abaisser le coût du travail par une atteinte directe au salaire.

Le constructeur automobile l’a démontré de la plus belle des manières en proposant aux salariés de son site de Vesoul de travailler 2 h 45 de plus par semaine, soit 7,86 % de plus, pour une rémunération supérieure de 2,8 %. Les 3 000 salariés verront donc purement et simplement leur salaire horaire se réduire et travailleront en réalité 1 h 47 minutes gratuitement chaque semaine.

Globalement, cela représente un recul de 4,7 % de la rémunération horaire du salarié par rapport à son salaire horaire actuel. Mais il faut se souvenir qu’une heure supplémentaire qui dépasse les 35 heures est facturée 10 % de plus. En théorie donc, une augmentation du temps de travail de 7,86 % conduit à une augmentation de la rémunération de 8,65 %. Chez PSA Vesoul, ce sera donc trois fois moins. Ce dispositif est permis par la réforme du code du travail mise en place par le gouvernement : non seulement elle permet de sortir des 35 heures, ce qui est possible depuis toujours et facilité depuis longtemps, mais elle permet surtout de payer l’heure supplémentaire moins cher que l’heure « normale ».

C’est une formidable machine à réduire le coût salarial horaire. Évidemment, ce procédé est renforcé par les autres dispositifs de la nouvelle loi sur le travail. La facilité accrue à licencier rend la menace de la perte d’emplois plus palpable et, de fait, le dispositif plus acceptable pour des salariés qui, entre une augmentation du salaire net mensuel et la perte de leurs emplois, auront vite fait le choix. Et comme, désormais, l’opposition syndicale peut être contournée par un référendum d’entreprise dont la campagne électorale n’exclut pas les menaces, l’imposition de cette baisse du salaire horaire est d’une grande facilité.

[…] In fine, la vision gouvernementale apparaît au grand jour : le salarié français est seul responsable de la faiblesse de la compétitivité du pays et doit donc accepter de bénéficier de moins de protection, mais aussi de subir une perte en termes de salaires. « Seul » parce que l’on aura bien noté que le gouvernement, lui, ne demande rien aux entreprises en retour des largesses qu’il leur accorde directement ou indirectement (CICE, baisse de l’impôt sur les sociétés, réduction de l’ISF et mise en place du PFU).

[…] Les concurrents du site PSA de Vesoul ne manqueront pas de lui emboîter le pas en réduisant encore les salaires horaires pour être plus compétitifs. Ce sera une fuite en avant où PSA et ses salariés sont loin d’être sûrs de gagner. Du reste, plus généralement, cette logique ne semble pas la bonne pour l’industrie française. La capacité à ajuster par les salaires est aussi une incitation à ne pas investir davantage dans la qualité des biens produits et des prestations. Elle favorise une logique : celle de la baisse des prix plutôt que la montée en gamme.

[…] PSA, entreprise qui a réalisé près de 2 milliards d’euros de bénéfice net en 2017, met à nu la réalité de la politique du gouvernement : celle d’une course au moins-disant salarial. Il lui sera bien délicat de prétendre encore être, dans ces conditions, le « gouvernement du pouvoir d’achat ». […]


Romaric Godin, Médiapart – Titre original « Derrière les ordonnances, le dumping salarial » – Source (Extrait)


 

Une réflexion sur “Code du travail an II.

  1. jjbey 19/05/2018 / 23h26

    La course au profit continue et il n’y a aucune raison que cela s’arrête. Le code du travail maltraité sous Hollande n’est qu’un outil pour satisfaire les besoins du capitalisme.

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