Y aura-t-il des bougies pour Noël ?

La semaine dernière, alors que la France cramait et étouffait comme jamais, pour cause de dérèglement climatique, Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, dispensait de sages conseils aux Français : éteindre le WiFi, débrancher les prises électriques, baisser la clim…

Bref, multiplier les « petits gestes du quotidien » qui permettent de faire de précieuses économies d’énergie, car « c’est bon pour nos réserves et évidemment pour la planète ».

Au même moment, les ingénieurs les plus brillants du pays, du moins on l’espère, planchaient sur le casse-tête de l’EPR de Flamanville, qui leur cause bien du tracas.

L’EPR, c’est ce réacteur nucléaire « nouvelle génération » qui doit équiper la centrale de la Manche et confirmer le savoir-faire français en matière de génie atomique. Il se trouve que c’est plus compliqué que prévu.

Les travaux ont déjà pris plus de dix ans de retard, et l’ardoise est passée de 3,3 milliards d’euros à presque 13 milliards. Et au fil du chantier, les découvertes de malfaçons se succèdent : fissures dans le béton, soudures non conformes sur les tuyaux d’évacuation, anomalies dans la composition du couvercle et du fond de la cuve, vibrations de la tuyauterie du pressuriseur enregistrées au double de la limite autorisée…

Dernier gag en date, on vient de s’apercevoir – ou plutôt de reconnaître, car le problème a été détecté en 2019 – que deux systèmes de contrôle du réacteur sont défectueux. Et que la panne n’est pas réparable, sauf à tout casser, car l’un de ces systèmes, une sonde de mesure de puissance, est coulé dans la maçonnerie du support de cuve…

En clair, si l’EPR de Flamanville démarre un jour, ce sera en mode « dégradé », pour utiliser l’euphémisme officiel.

Tout cela, bien entendu, ne s’apprécie pleinement qu’au regard de la politique énergétique de la France, qu’on peut résumer en deux mots : tout nucléaire.

Pour rappel, 70 % de notre énergie est d’origine nucléaire, via 56 réacteurs dont la moitié sont actuellement à l’arrêt, soit parce qu’ils sont en maintenance ou en réparation – car les années passent pour tout le monde, même pour l’électricité miracle –, soit parce qu’ils ont des problèmes de sécurité.

Et Emmanuel Macron, fidèle à sa devise « quoi qu’il en coûte », a décidé que la France se dotera de six nouveaux EPR, qui devraient, eux aussi, réserver quelques sueurs froides à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et à la Cour des comptes. Mais, nous le savons, c’est pour la bonne cause écologique : l’électricité nucléaire n’est-elle pas la plus belle des énergies « décarbonées », à même de sauver à la fois la planète et la croissance ?

Certes, elle nécessite de l’eau, beaucoup d’eau, pour refroidir ses réacteurs. Eau qui va se faire toujours plus rare et devenir, à terme, une denrée de survie, mais on n’a rien sans rien. C’est d’ailleurs pour cela que le gouvernement nous demande d’éteindre le WiFi quand on se brosse les dents.

[…]


Gérard Biard. Charlie hebdo. 27/07/2022. Web Source (Extraits)


3 réflexions sur “Y aura-t-il des bougies pour Noël ?

  1. bernarddominik 31/07/2022 / 10h02

    L’échec de l’EPR est à l’image de la gouvernance de l’état : toujours plus cher et de moins en moins efficace. Toujours plus de lois (la France a le record mondial) qui s’avèrent toujours aussi peu efficaces et qu’il faut donc reformuler quelques années plus tard.

  2. Pat 31/07/2022 / 14h29

    Heureusement que le climat se réchauffe : l’hiver sera moins dur à passer ! (Ben quoi ? J’essaye d’être positif !)

    • Libres jugements 31/07/2022 / 16h03

      Bien joué, n’est-ce pas ce qui s’appelle envoyer dans les cordes…
      Amitiés
      Michel

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