La cheffe de la com’ n’aime pas les insectes

Petit rappel. En 2017, une étude scientifique sidère les biologistes du monde entier. Pendant vingt-sept années, des naturalistes ont observé, compté, pesé les insectes dans les quelque 60 réserves protégées allemandes.

A leur effarement, ils constatent que les trois quarts de la biomasse des insectes volants y ont disparu. On imagine les dégâts aux alentours ! Responsables de cette hécatombe, les pesticides déversés partout. Partout, l’insecte est l’ennemi à abattre.

Or le socle du monde animal c’est lui. La moitié des êtres vivants est constituée d’arthropodes (insectes, araignées, crustacés). Ce sont les insectes qui décomposent les matières organiques, assurent la pitance de nombreuses autres espèces, pollinisent.

Le biologiste Pierre-Henri Gouyon l’affirme : « Les pesticides sont certainement la raison, de loin la plus violente, de la disparition des formes naturelles dans notre pays, et tout ça est caché comme on a caché les effets du tabac sur le cancer. »

Née en 1991, Eleonore Leprettre est titulaire d’un master 2 en com’ et publicité. En 2018, la voilà cheffe adjointe puis cheffe du cabinet de Marc Fesneau, alors ministre des Relations avec le Parlement. Mais, le quinquennat s’achevant, elle quitte son poste.

En avril, la présidente d’Anticor prévenait « L’Humanité » (2/6) : « C’est un peu la foire, depuis six mois. Les lobbys, grands groupes et cabinets de conseil cherchent à recruter un maximum de hauts fonctionnaires proches des ministres pour le prochain quinquennat. »

Où atterrit Eleonore Leprettre dès la mi-mai ? Chez Phyteis, le lobby des entreprises agrochimiques. Elle est désormais la grande cheffe de la com’ de ceux qui se démènent pour que notre pays reste l’un des champions mondiaux des pesticides.

Or, divine surprise ! quelques jours plus tard, le 20 mai, son ancien patron Marc Fesneau se retrouve bombardé ministre de l’Agriculture.

Devinez quelle est l’une de ses principales missions ?

Faire appliquer la récente décision de Bruxelles qui vise à réduire de 50 % l’usage des pesticides d’ici à 2030. Une décision dont « Le Monde » (12/6) vient de nous apprendre qu’elle repose sur un « indice HRI1 » scientifiquement peu fiable, ce qui permettra au lobby de la contourner aisément.

On imagine l’ambiance chez Phyteis. Champagne !

Comme elle a l’oreille du nouveau ministre, la cheffe de la com’ Eleonore Leprettre va facilement lui faire comprendre que réduire pour de vrai l’usage des pesticides au nom de la santé humaine et animale ne peut qu’affecter notre compétitivité agricole, notre souveraineté alimentaire, notre PIB, le moral de nos agriculteurs et de nos éleveurs.

Faisons comme en 2007. À la suite du fameux Grenelle de l’environnement de Sarkozy, la même promesse idiote avait été formulée : réduire de moitié l’usage des pesticides en dix ans. Il n’a fait qu’augmenter. Renouvelons le gag !

Le quinquennat sera écologique ou ne sera pas.


Jean-Luc Porquet. Le canard Enchainé. 15/06/2022


Une réflexion sur “La cheffe de la com’ n’aime pas les insectes

  1. jjbadeigtsorangefr 21/06/2022 / 14h44

    On protège la bio diversité en la détruisant, vous n’êtes pas d’accord ?
    On vous expliquera que plus on pollue et plus on fournit d’aliments aux écosystèmes qui protègent la planète………
    Monsanto et compagnie vous aiment et continueront pour votre bien.
    Vous n’avez pas compris? Vous êtes nuls.

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