Supermarché et corruption

Quand les hypermarchés ouvrent par dizaines, au début des années 1970, les partis politiques sont largement financés par des surfacturations de marchés publics, notamment à l’échelle des communes, contrôlées principalement par les gaullistes et les socialistes.

À l’exemple de la Société d’études législatives pour les premiers et d’Urba pour les seconds, chaque camp dispose d’un organisme chargé de récolter et de centraliser les fonds occultes. « Il est patent que ce financement est aujourd’hui assuré dans une proportion importante par des “contributions” versées à l’occasion des procédures d’autorisation d’urbanisme commercial », constatait un spécialiste dans les années 1980 (1).

Les ressources du code de l’urbanisme puis l’accroissement des compétences locales par les lois de décentralisation de 1982 ont multiplié les possibilités de marchander la décision publique. « La loi du 27 décembre 1973 d’orientation du commerce et de l’artisanat (ou loi Royer), qui visait à encadrer le développement de l’urbanisme commercial, en soumettant l’ouverture de nouvelles surfaces commerciales de plus de 1 500 mètres carrés à l’autorisation de commissions où les élus locaux jouaient un rôle décisif, a eu pour effet pervers de mettre en place les conditions d’une corruption à si grande échelle qu’elle finit par être dénoncée par certaines entreprises de la grande distribution elles-mêmes », constatait l’éphémère service central de prévention de la corruption (2).

Le rôle déterminant attribué aux élus leur a permis de monnayer leurs décisions, non seulement pour obtenir le financement d’équipements publics pour leur collectivité, mais aussi pour alimenter les caisses noires de leurs partis, voire leur caisse personnelle.

Saisis en cas de recours à la commission nationale, les ministres du commerce autorisaient généralement les nouvelles implantations. On note même un pic d’autorisations au moment des alternances politiques (1981, 1986…).


Extraits d’un dossier du « Monde Diplomatique » sur la ville – Source (extraits)


  1. Yann Tanguy, « Quand l’argent fait la loi. Le cas de l’urbanisme commercial » (PDF), Pouvoirs, no 46, Paris, septembre 1988.
  2. « Rapport 2013 » (PDF), service central de prévention de la corruption, Paris, 2014.

2 réflexions sur “Supermarché et corruption

  1. bernarddominik 25/11/2021 / 13h24

    La corruption est le mode de fonctionnement de notre démocratie. Dans certaines communes le maire conseille, contre rémunération occulte, comment contourner les lois et règlements. La politique, non encadrée par des lois dont on se donne les moyens de les faire appliquer, est intimement liée à la corruption, l’absence de limite sur le nombre de mandats permet aux élus de s’installer dans la corruption

  2. jjbey 25/11/2021 / 18h42

    Les profits doivent profiter à ceux qui les permettent…..

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