Drone de chose …

L’espion qui volait

En France, les vols de drones civils sont autorisés depuis 2012. Et les utilisations de ces appareils sans pilote se développent à toute vitesse. Pour le meilleur… et pour le pire

A l’Ecole polytechnique de Zurich, l’équipe de Raffaello D’Andrea a conçu un drone capable de transporter des parpaings et de les empiler en quinconce, selon un plan programmé que les petits « quadroptères » exécutent.

Visible sur internet, l’impeccable assemblage d’un mur circulaire en mode automatique stupéfie et fait frémir: après tellement d’autres métiers tués par la technologie, celui de maçon va-t-il disparaître lui aussi ? On n’en est pas encore là, mais les drones, ces aéronefs volant sans pilote, gros ou minuscules, sont appelés à se multiplier de façon exponentielle pour toutes sortes d’utilisations 100% civiles.

Silencieux et souvent indétectables, ils vont pulluler dans l’atmosphère… pour nous protéger ou nous espionner, nous porter secours ou nous verbaliser, nous amuser ou nous tuer. Pour Frédéric Serre, fondateur et président du directoire de la société grenobloise Delta Drone, « il s’agit d’une véritable rupture technologique, tout comme l’ordinateur individuel, l’internet ou le téléphone portable, dont personne n’avait imaginé l’immense impact ».

D’une certaine façon, le drone – mot anglais désignant l’insecte qu’on nomme en français « faux bourdon » – est un descendant direct du téléphone de poche. Un processeur rapide, une batterie de haute qualité, un récepteur GPS et des capteurs électroniques: tous ses composants se trouvent dans un iPhone, il suffit juste d’ajouter les hélices qui, disposées en couronne circulaire, lui permettront de se déplacer en silence, comme un ovni.

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Avis aux (photographes) amateurs… la partie devient facile. Un drone photographe, muni de deux caméras – l’une frontale, l’autre axiale (dirigée vers le sol) – est actuellement vendu pour la modique somme de 299 euros (à la Fnac), et nettement moins cher sur internet.

Cet « AR­Drone », de la marque Parrot, est en fait un simple accessoire périphérique pour iPhone. De conception et de construction purement française, il se pilote de façon « intuitive » avec le téléphone, lequel enregistre à volonté les photos et vidéos enregistrées par l’une ou l’autre des deux caméras.

Bref un merveilleux joujou, présenté par son fabricant comme essentiellement « ludique » qui permet par exemple d’aller photographier ou filmer les fenêtres, les jardins, les piscines de ses voisins.

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Aux Etats-Unis, les drones civils sont tout simplement interdits, leur autorisation de voler étant programmée pour 2015. (…)

En France, selon Frédéric Serre de Delta Drone, «nous bénéficions d’une formidable avance sur, tout le reste du monde »: depuis avri12012, les vols de drones y sont en effet autorisés, par un « arrêté sur l’utilisation des aéronefs civils qui circulent sans aucune personne à bord »…

Aussi inattendu que providentiel, cet arrêté a été saisi… au vol par quelques hardis industriels hexagonaux: pas moins d’une vingtaine d’entre eux fabriquent actuellement des drones civils. Ce sera peut-être trop.

Mais, pour le moment, ne boudons pas ce plaisir si rare: en France, les (toutes petites) usines de drones tournent à plein régime…

FABIEN GRUHIER – Nouvel OBS N°2536