Handicap, il s’y attèle !

Ça y est, Macron a trouvé le truc pour reconquérir le cœur des Français : leur offrir un fauteuil roulant.

Le président de la République sera celui par qui l’inclusion des personnes handicapées ou dépendantes arrive. Soixante-dix mesures, pas une de moins, ont été annoncées lors de la sixième Conférence nationale du handicap, qui s’est tenue le 26 avril à l’Élysée.

« Soixante-dix mesures fortes » qui seront mises en œuvre « rapidement », craché, juré.

Roulez tambours, mais ne rangez pas les casseroles, elles pourraient resservir…

Parce que la question de la prise en charge du handicap arrive largement en tête des promesses politiques jetées en l’air, mais jamais retombées, tous camps et gouvernements confondus.

Pour commencer, personne n’est foutu de donner des chiffres précis. Les handicapés, c’est un peu comme les participants à une manif : l’État en reconnaît et en indemnise un peu plus de 2,7 millions, les associations en dénombrent 12 millions, et la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) les évalue à 7,7 millions…

La première loi instaurant l’obligation de rendre les établissements recevant du public (administrations, établissements de santé, écoles, commerces, établissements culturels, etc.) accessibles aux handicapés date de… 1975. Tout le monde, ou presque, a fait comme si elle n’existait pas.

Puis le législateur et les pouvoirs publics se sont réveillés en 2005, en décrétant que, cette fois, c’est sûr, tous les bâtiments recevant du public seront adaptés en 2015.

En septembre 2014, on s’est de nouveau aperçu qu’il n’en serait évidemment rien. On a ainsi pondu en catastrophe une ordonnance instaurant une cascade de dérogations, qui sont devenues la norme.

Aujourd’hui, la moitié des établissements recevant du public sont toujours inaccessibles aux handicapés. Dans l’espace public, les Jeux paralympiques (saut de haies, slalom, etc.), c’est toute l’année.

Ce qui a valu à la France d’être condamnée, le 17 avril, par le Comité européen des droits sociaux (CEDS) du Conseil de l’Europe pour « violation des droits des personnes en situation de handicap et de leurs familles ». Ce nouveau train d’annonces mirifiques tombe donc à pic.

Attention, cette fois, parole de Macron, c’est du sérieux. 1,5 milliard d’euros seront investis dans l’« accessibilité ». Les fauteuils roulants seront remboursés à 100 % dès 2024. Un « service de repérage, d’évaluation et d’intervention précoces et intensifs » sera créé.

Les primes pleuvront sur ceux qui voudront effectuer des travaux d’adaptation de leur logement. Bien sûr, l’État s’engage à garantir « d’ici à trois ans l’accessibilité des démarches et sites internet publics ». Car, surprise, la « dématérialisation » à marche forcée des services publics, qui fait qu’il est désormais devenu quasi impossible d’avoir affaire à un être humain pour effectuer une démarche administrative, laisse sur le carreau les personnes qui souffrent d’un handicap visuel ou mental…

Du côté de la « mobilité », là aussi, tout va changer. Geneviève Darrieussecq, la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, le jure : « Toutes les gares nationales [seront] mises en accessibilité complète en 2027. »

Non seulement les trains arriveront à l’heure, mais en plus, on pourra monter dedans, promis. Admettons.

Il ne restera plus qu’à permettre aux personnes handicapées de s’y rendre, à la gare. Puisque actuellement, seulement 3 % des stations du métro parisien leur sont accessibles…

Qu’à cela ne tienne, les handicapés pourront se rabattre sur la future aide à l’« acquisition de voitures électriques adaptées ». Ce n’est pas parce qu’on n’a pas de jambes qu’on ne peut pas participer à la grande croisade pour la croissance verte. Dans ce vaste plan de com’ tissé de prophéties non autoréalisatrices, c’est d’ailleurs peut-être la seule mesure qui sera vraiment mise en œuvre.


Gérard Biard. Charlie hebdo. 03/05/2023


Indiscutablement, il s’agit d’un problème récurrent qu’il faut absolument résoudre, cette fois sera-t-elle la bonne ? Dans tous les cas, souhaitons que de nettes améliorations d’accès permettant de vivre couramment, soient apportées, une bonne fois pour toutes, aux victimes du handicap. MC


3 réflexions sur “Handicap, il s’y attèle !

  1. bernarddominik 08/05/2023 / 8h19

    Sur le nombre d’handicapés il est normal d’avoir des chiffres aussi disparates, car tout dépend du taux d’handicap. Il y a des handicaps invisibles, tous n’ont pas besoin d’un fauteuil. Et les associations se servent de cette ambiguïté pour collecter des fonds, avec tout ce que cela comporte de dérives.

    • Libres jugements 08/05/2023 / 12h06

      Prière de ne pas sous-entendre que toutes les associations sont vénales. Ce n’est certes pas le cas dans ton commentaire Bernard, ma remarque va en direction des abusés de certaines assos.
      En matière de handicap invisible, ma femme étant dans ce cas, ayant un badge sur le véhicule est confrontée alors qu’elle bénéficie des places de parking handicapés, aux vindictes de celles ou ceux dont le handicap est visible, voire subi des insultes. MC

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