Ça attire les jeunes — La clope jetable.

Auprès des collégiens et lycéens, les « puffs » font un tabac.

Sous ce nom barbare se cachent des cigarettes électroniques jetables au goût de bonbon qui, après un lancement en fanfare sur Internet et les réseaux sociaux, s’arrachent désormais chez les buralistes. Disposés à côté des paquets de cigarettes classiques, les sticks aux couleurs vives et acidulées attirent l’œil des ados et des préados comme des confiseries.

Très… prisés, le parfum « Choco Noisette », avec son tube violet et son dessin de vache, le « Jane and Gary’s Ice Cream », au logo presque identique à celui d’une célèbre marque de glace américaine et l’inénarrable « Zumba Caféo », un clin d’œil au tube « Bande organisée », du rappeur marseillais Jul.

Puff, daddy ?

Alertés, des adultes sonnent l’alarme, à l’image de ce principal de collège du XIXe arrondissement parisien qui a contacté par mail les parents d’élèves, rapporte « Le Parisien » (13/1). Il faut rappeler que toutes les cigarettes électroniques, y compris les jetables, sont interdites aux moins de 18 ans ; la plupart sont en effet riches en nicotine, laquelle crée la dépendance à l’origine de la fortune des cigarettiers.

Les puffs ont « débarqué à la Toussaint sur [le réseau social préféré des jeunes] TikTok. Depuis qu’il y en a dans les tabacs, tout le monde en a », se réjouit un ado de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). Son « e-cigarette » à la main, il raconte avoir « l’impression du fumer une chicha portable ». Le gros « plus » ? « Ne pas sentir le cendrier » lorsqu’il croise ses parents. Malgré un coût moyen compris entre 8 et 12 euros le bâtonnet — soit 600 bouffées, en moyenne —, il s’y retrouve « niveau budget », et, « en plus, la puff est jetable à la poubelle », croit-il savoir.

Ecran de fumée

Ces arguments de vente sont ceux déployés par Liquideo, qui commercialise la clope sous le nom de Wpuff. Sauf que, sur le plan écologique, les conséquences, à cause des composants électroniques de ce produit, se révèlent catastrophiques. Induits en erreur par la marque prétendant que le produit est « jetable », les consommateurs s’en débarrassent au mauvais endroit.

Le discret pictogramme de poubelle barrée imprimé sur l’emballage, qui impose au fabricant de gérer la fin de vie des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), n’y change rien. Plutôt que de confier la tâche de collecte de ces déchets à un éco-organisme spécialisé, Li­quideo assure, sur son site Internet, avoir passé un « partenariat » avec une ONG écolo, dont le logo figure sur son site de vente.

Réaction de l’intéressée ? « L’utilisation de notre image est frauduleuse, et le discours mensonger ! Nous nous sommes fait avoir », réagit avec colère Léonie Chaventré, responsable des partenariats de l’association Planète Urgence, alertée par les questions du Volatile. Après avoir découvert le pot aux roses, elle a contacté l’entreprise pour qu’elle retire la publication.

« Il n’y a pas d’accord pour que Liquideo utilise notre image. L’entreprise a simplement fait un don de 1 000 euros déductibles d’impôts à 60 % dans le cadre de notre opération « 1 = 1 arbre » », explique-t-elle. Le « certificat de plantation » est en effet en bonne place sur le site Internet de Liquideo, où il figure en trois exemplaires.

Quant au logo de l’ONG, il est toujours là, mais il a disparu de la page d’accueil pour laisser place à un nouveau bandeau officiel rappelant l’interdiction de la vente aux mineurs. Y avait-il un doute ? Liquideo annonce aussi l’arrivée, dans les « magasins partenaires », de boîtes de recyclage des déchets, pour l’heure introuvables chez les buralistes. Un écran de fumée pour des produits qui marchent du feu de Dieu ?


Jérôme Canard – Le Canard Enchainé – 19/01/2022


Une réflexion sur “Ça attire les jeunes — La clope jetable.

  1. rbernarddominik 26/01/2022 / 8h30

    Les interdictions ne sont pas respectées et les policiers préfèrent tourner la tête pour ne rien voir. On est entre la licence pour ce qui rapporte et la répression pour ce qui coûte ou emmerde Macron.

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