Être pour ou contre les migrations n’a guère de sens.

Comme d’habitude ci-après une vision sur la migration qui peut choquer où satisfaire mais une sélection qui se veut avant tout « posté » pour amener la réflexion. MC

Ancien journaliste au Monde, Stephen Smith annonce dans son dernier essai, La Ruée vers l’Europe, un “choc migratoire” sur le Vieux Continent. Dans cette longue interview, (que vous pouvez lire en intégralité en achetant le N° 1190 des Inrocks) ce spécialiste de l’Afrique justifie les ressorts de son inquiétude.

C’est une prédiction qui donne des sueurs froides à l’extrême droite : l’Europe vieillissante qui se dépeuple va être confrontée à une vague migratoire massive venue d’une Afrique jeune, surpeuplée et rêvant d’un avenir meilleur. Cette explosion démographique va soumettre à une “épreuve sans précédent” la cohésion des sociétés européennes.


  • Pourquoi considérez-vous qu’une immigration massive de l’Afrique vers l’Europe est inéluctable alors que nous n’avons pas connu de pic d’immigration africaine ces dernières années ?

Stephen Smith — Il y a des “pics” dans l’afflux de réfugiés, en fonction des crises. En revanche, la migration avance à pas lents, comme la démographie. Prenons l’exemple de l’Afrique subsaharienne et de la France. Au milieu des années 1960, il y avait environ 30 000 Subsahariens dans l’Hexagone, aujourd’hui ils sont plus d’un million, soit 35 fois plus. En 1960, l’Afrique comptait 300 millions d’habitants, aujourd’hui elle en compte 1,3 milliard et elle en comptera 2,5 milliards en 2050 – et ce n’est pas de la science-fiction puisque les parents des Africains qui vont naître dans les trente ans à venir sont déjà nés. Raisonnablement, on peut donc parler d’un essor migratoire et s’attendre à ce qu’il se poursuive alors que l’Afrique subsaharienne n’a pas encore achevé sa “transition démographique”, c’est-à-dire le passage de familles nombreuses avec une faible espérance de vie à des familles plus réduites mais avec des vies plus longues.

La base de mon raisonnement, c’est que l’Afrique subsaharienne n’est pas un lieu « exotique » mais fera ce que le Maghreb a fait avant elle, ce que les Mexicains ont fait en partant massivement aux Etats-Unis ou ce que les Européens ont fait à la fin de leur propre transition démographique, quand 60 millions d’entre eux – sur un total de 200 millions en 1880 et 300 millions en 1914 – sont partis pour le Nouveau Monde.

Les sondages du Pew Research Center en 2017, tout comme ceux de Gallup auparavant, indiquent qu’autour de 40 % des jeunes Subsahariens voudraient migrer. Certes, tous ne passeront pas à l’acte. Mais même une petite fraction de 1,3 milliard et, demain, de 2,5 milliards, cela fait nombre.


Interview réalisée par David Doucet – Les Inrocks – Source (Extrait très partiel)


 

2 réflexions sur “Être pour ou contre les migrations n’a guère de sens.

  1. La Nébuleuse 26/09/2018 / 17h35

    Je pense quand-même que ce n’est pas anodin de parler de vague ou de choc migratoire, un essor ou une augmentation oui, mais les premiers termes impliquent que ce soit un problème majeur pour les pays européens… Or jusqu’à présent, la crise migratoire, ce sont nos pays qui la créent en s’obstinant à ne pas anticiper, à laisser les migrants dans des conditions indignes, alors que leur nombre sur nos territoires est ridicule au vu du nombre de personnes qu’on pourrait accueillir en réalité.

    Stephen Smith est connu pour des ouvrages qui ont fait polémique, j’ai essayé de chercher des critiques un peu constructives pour apporter quelque chose au débat, j’ai trouvé ça si jamais ça t’intéresse : https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2003-4-page-149.htm

    • Libres jugements 28/09/2018 / 21h12

      Merci pour être passé sur ce blog et le commentaire apporte à la réflexion.
      Cordialement
      Michel

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