Le parlement Israëlien « s’ouvre » à l’apartheid.

[…] Si la loi sur les libertés du 17 mars 1992 définissait Israël d’un bel oxymore – un « État juif et démocratique » – laissant quelque place à l’interprétation, depuis jeudi, le caractère inégalitaire de l’État israélien est désormais assumé et gravé dans le marbre de la Loi.

Avec 62 voix contre 55 et 3 abstentions, la Knesset a adopté le texte élevant le pays au rang « d’État-nation du peuple juif ».

La langue arabe n’aura plus désormais qu’un « statut spécial »

Pour les députés de la Liste arabe unie, cette loi correspond à « la mort de (leur) démocratie ». Une formule qui fait écho à celle qui avait accompagné l’assassinat d’Yitzakh Rabin, tué le 4 novembre 1995 par l’ultranationaliste religieux Ygal Amir. Quand il était aux manettes, le premier ministre travailliste et signataire des accords d’Oslo a toujours tenté de respecter l’esprit de la déclaration d’indépendance du 14 mai 1948, qui assure « une complète égalité de droits sociaux et politiques à tous les citoyens israéliens, sans distinction de croyance, de race ou de sexe ». Autant de valeurs ouvertement violées par les dispositions inscrites dans cette nouvelle loi made in Likoud.

Le texte cible particulièrement les Palestiniens d’Israël, soit 17,5 % des habitants du pays. La notion de judaïté accolée à celle de nation les rabaissent de facto à une citoyenneté de second rang. Un article stipule même que la langue arabe qui, au même titre que l’hébreu, avait jusqu’alors le statut de langue d’État, n’aura plus désormais qu’un « statut spécial ». Pour Saëb Erakat, secrétaire général de l’OLP, ce genre de détails révèle une loi raciste qui « légalise officiellement l’apartheid en Israël ». […]

Quelques mois après l’inauguration de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem par Donald Trump – qui a débouché sur le massacre par l’armée israélienne d’une soixantaine de Gazaouis venus manifester à la frontière –, la loi définit officiellement la ville comme capitale « complète et unifiée » du pays. Et ce, alors même que le statut de Jérusalem – comme le droit international l’y engage – ne peut être tranché qu’au terme de négociations de paix avec les Palestiniens.

Autre point oublié : l’article évoquant la possibilité de créer des localités exclusivement réservées aux juifs. Après que l’opposition a réussi à en faire reconnaître l’aspect discriminatoire, le texte amendé affirme néanmoins que « l’État considère que le développement des implantations juives relève de l’intérêt national ». […]


Stéphane Aubouard – Source (Extrait)