Encore un exploit de CNews !
Le 29 février 2024, le journaliste Romain Desarbres lance un sujet sur « le ras-le-bol des pompiers volontaires » : émoluments de misère, journées perdues dans les services des urgences, enchaînement des nuits de garde, non-respect du droit du travail… les soldats du feu non professionnels s’échauffent. C’est en Gironde que la chaîne Bolloré a dépêché son correspondant.
D’emblée, le reporteur plante le décor : « Nous avons rendez-vous avec des pompiers volontaires devant une clinique de Bordeaux. » Anonymement, « Henri P. », pompier volontaire, se plaint de faire un boulot d’« ambulancier » et dit les choses tout de go : « On gagne à peu près le salaire d’une femme de ménage. » Ce qui expliquerait le recours majoritaire aux pompiers volontaires plutôt qu’à des professionnels, dont le coût est nettement plus élevé…
A l’insu de son plein gré
C’est surtout à Henri P. que le reportage a coûté cher. Car, concernant l’anonymat de son témoin, la chaîne d’info s’est surpassée !
- Primo, le reportage commence par un plan de véhicules, sur un parking, dont les plaques d’immatriculation ne sont pas floutées.
- Deuzio, même si seuls les bras et les mains du pompier sont visibles, ses avant-bras sont tatoués, donc reconnaissables.
- Tertio, sa voix n’est pas masquée. Et, pour parfaire le tout, son grade d’adjudant-chef est bien en vue !
En trois minutes, toute la caserne l’a reconnu.
Conséquence : après vingt ans de service, et alors qu’il venait de recevoir la médaille de la sécurité civile, Henri P. a été démis d’une partie de ses fonctions.
Le 6 avril, il a fini par présenter sa démission. Depuis, « pour l’honneur », il a écrit au Conseil de déontologie journalistique et de médiation pour expliquer que le reporteur l’avait « filmé à son insu avec son téléphone portable » alors qu’il lui avait bien précisé ne pas vouloir être enregistré, pour respecter son devoir de réserve. Il a aussi écrit audit reporteur de CNews — chaîne d’ordinaire très à la pointe de la défense des pompiers contre les violences des banlieues pour souligner ses « drôles de méthodes ». Il semblerait que, des deux côtés, il n’y ait pas le feu pour lui répondre.
Christophe Nobili. Le Canard enchaîné. 30/04/2024
Pour moi le grand coupable c’est l’autorité qui l’a licencié. Même le devoir de réserve ne justifie pas son licenciement, il aurait dû recevoir une remontrance sans plus. En France les autorités n’aiment pas entendre de critique, pourtant sans critique il n’y a pas d’éloge sincère, et sans critique aucun service ne peut s’améliorer. On peut donc raisonnablement affirmer que les préfets (autorité suprême des pompiers) s’en foutent complètement si le service fonctionne mal.
C’est d’une tristesse… de quoi vous dégouter et de ne plus faire de bénévolat..
Pour ma part, il me semble que le journaliste a failli.. de même que ceux qui ont publié le reportage…sans précaution.. bonjour les dégats.. Solidarité !