Les aventures d’un Bibi fricoteur

La scène se passe en janvier 2020.

Reçu aux côtés d’Emmanuel Macron dans les bureaux du président israélien, Reuven Rivlin, le député de la 8e circonscription des Français de l’étranger (Israël, territoires palestiniens, Italie, Grèce, Chypre, Malte, Turquie…), Meyer Habib (apparenté LR), y pénètre d’un pas assuré. Parlant toujours un peu trop fort, toujours un peu chiffon, sûr d’être chez lui, s’incrustant systématiquement dans les rendez-vous diplomatiques qui ne le concernent pas, Habib en stupéfie plus d’un, ce jour-là. Le voilà qui s’assoit sur le canapé présidentiel… avant Emmanuel Macron. Jamais gêné, il ne songe pas une seule seconde à s’excuser.

Il avait déjà montré les crocs en 2015. Alors ministre des Finances, le futur président se rend en Israël sans Meyer Habib. Grossière erreur. En dépit de tous ses efforts, il ne sera pas reçu par Netanyahou. « Bibi », grand copain d’Habib, n’a rien à lui refuser. Il a financé nombre de ses déplacements en France. Des petits cadeaux qui scellent l’amitié. Maintenant, le pli est pris : à chaque voyage de Macron à Tel-Aviv, Habib est bien au chaud dans l’avion présidentiel et se pousse du col dans toutes les réunions. Il a fait mordre la poussière aux diplomates les plus chevronnés. En 2005, lors du dîner organisé pour les couples Sarkozy et Netanyahou, c’est lui qui se retrouve à la table des invités, et non Gérard Araud, alors ambassadeur de France.

Il avait déjà montré les crocs en 2015. Alors ministre des Finances, le futur président se rend en Israël sans Meyer Habib. Grossière erreur. En dépit de tous ses efforts, il ne sera pas reçu par Netanyahou. « Bibi », grand copain d’Habib, n’a rien à lui refuser. Il a financé nombre de ses déplacements en France. Des petits cadeaux qui scellent l’amitié. Maintenant, le pli est pris : à chaque voyage de Macron à Tel-Aviv, Habib est bien au chaud dans l’avion présidentiel et se pousse du col dans toutes les réunions. Il a fait mordre la poussière aux diplomates les plus chevronnés. En 2005, lors du dîner organisé pour les couples Sarkozy et Netanyahou, c’est lui qui se retrouve à la table des invités, et non Gérard Araud, alors ambassadeur de France.
  • Betar mouillé

Très loin d’être un imbécile, le Franco-Israélien Meyer Habib, diplômé du très célèbre Technion de Haïfa, est pourtant fort bien résumé par la formule : « Il ose tout, c’est même à cela qu’on le reconnaît. » Oui, il ose tout. Insulter des collègues députées et les traiter de « petites connes » tout en s’offusquant ultérieu­rement d’être traité de « connard », s’afficher avec une kippa dans les couloirs de l’Assemblée, remercier le « Tout-Puissant » devant le mur des Lamentations pour sa réélection alors qu’il est élu d’une République laïque, s’afficher en fervent soutien de la colonisation en Cisjordanie, assumer d’être le véritable porte-parole de Netanyahou en France, alors qu’il est un député français. Il est où, le problème ? Ben nulle part, on dirait.

Ceux qui voient en Meyer Habib une sorte d’hurluberlu un peu folklo devraient pourtant relire de vieux journaux qui relatent une sale affaire remontant à 1988. C’est loin, tout ça, mais quand même…

En mai 1988, des militants du Betar, un mouvement de jeunesse juif radical et musclé, orienté (très) à droite, décide de s’en prendre aux « fafs » de l’Action française, à Paris. Dans le vocabulaire du Betar, on appelle ça « une action ». Bilan de ladite action : des femmes, des enfants frappés à coups de barres de fer, un septuagénaire qui passe plusieurs semaines dans le coma, et huit personnes indemnisées par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme. Pour le jeune Habib (27 ans, tout de même), deux ans de prison avec sursis pour violences volontaires et mise à l’épreuve pendant trois ans. Bref, des extrémistes juifs ont bastonné des fachos cathos. En appel, les peines sont un peu plus clémentes.

Meyer Habib a toujours intimement mêlé affaires et politique, et c’est bien là le problème. Lancé en politique par l’ancien président du Betar en France Jacques Kupfer, il s’associe à lui pour lancer une entreprise de bijouterie en Suisse. « C’était plus pratique pour ne pas payer d’impôts », rigole un homme d’affaires qui le connaît bien.

Un jour, il croise la route d’Arnaud Mimran. Le cerveau de la fraude à la TVA sur les quotas de carbone (la plus grande escroquerie de l’histoire de France, qui a coûté 1,6 milliard d’euros à l’Etat) a cofondé une société avec Meyer Habib. Ecouté à son insu dans sa prison, Mimran, comme l’a révélé Media-part, explique aujourd’hui que Meyer Habib connaissait parfaitement le fonctionnement de la gigantesque arnaque. En novembre 2022, la police a perquisitionné les bureaux d’Habib à l’Assemblée nationale en raison d’un soupçon de détournement de fonds publics. L’enquête est en cours.

  • Bath sup, Bath spé

Meyer Habib estime qu’il n’y a pas d’intégration possible pour les Juifs. La diaspora a vocation à rentrer en Israël. Pour l’y inciter, il souffle donc consciencieusement sur les braises, affirmant, après les attaques terroristes du 7 octobre : « Il y a des foules avides de sang juif qui sont en train de se balader dans Paris. » Avant de conclure : « Je crois que c’est déjà trop tard. »

Des rumeurs font de lui un possible ambassadeur d’Israël en France. A condition que son cher Bibi sauve sa propre carrière politique. Si tel était le cas, on pourrait bien rigoler. Car l’inénarrable Meyer Habib est hilarant quand il parle de politique étrangère. C’est le même tweet imprégné de bon vieux racisme à la papa qu’il a envoyé pour la mort de Ben Ali puis pour celle de Moubarak : « Dictateur, certes, comme tous les dirigeants arabes. Mais patriote et amoureux de son pays. » Une maxime qui ravirait Hubert Bonisseur de La Bath, alias « OSS 117 ».


Anne-Sophie Mercier. Dessin de Kiro. Le Canard enchaîné. 03/01/2024


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