Du cambouis dans les instances policières

Triche et fausses notes plombent la réforme de la police

L’enveloppe était copieusement garnie — 4 000 euros pour présider le jury du concours interne des commissaires ! Sans compter que la correction des copies n’était pas épuisante : le résultat avait été décidé d’avance.

Frédéric Dupuch, juge suprême de l’épreuve, avait communiqué des informations à une candidate et abaissé les notes de ses concurrents !

Une histoire de triche qui pourrait faire vaciller toute la future réforme de la police…

L’affaire débute le 6 mai 2022. La sûreté du Nord a mis le nez dans un trafic de stups et entend sur des écoutes une collègue, commandante, bavardant avec des voyous locaux. Aussitôt, elle est branchée elle aussi.

Surprise : les enquêteurs découvrent qu’un de ses interlocuteurs favoris n’est autre que l’un de leurs grands chefs à plumes et que, de surcroît, il va l’aider à prendre du galon. L’ambitieuse rêve de devenir commissaire, et ça tombe bien : cette année, le président du jury est son protecteur.

Alerté, le parquet de Lille refile le bébé au proc de Paris, qui confie une enquête préliminaire pour « fraude aux examens » à la police des polices. Mis au parfum, Frédéric Veaux, le directeur général de la police nationale, fait la tête. On le comprend !

  1. La jeune femme fait partie de son cabinet.
  2. Dupuch est un proche.
  3. C’est à lui qu’il a confié une grande réforme de la police !

Le projet, qui prévoit un seul chef flic dans chaque département, risque ainsi d’être fragilisé. D’autant qu’il a déjà été rejeté en bloc par la PJ et que sa première expérimentation (en Guyane) a tourné au fiasco.

Histoire de sauver les meubles, le numéro un de la police tente de trouver au plus vite un remplaçant à Dupuch. Sauf que, raille un commissaire, « personne ne veut de la place du mort ».

Quant à la commandante, elle aussi suspendue, elle traînait une cassolette, comme l’a découvert « Le Canard ». En 2003, elle est exclue de l’école d’officiers pour un petit écart. Relaxée en correctionnelle, elle est réintégrée l’année suivante.

Malgré un dossier administratif plombé, elle accède à un poste sensible auprès du grand patron des flics puis, en 2021, décroche le titre de commandante et l’habilitation « secret-défense ». Avec les félicitations du jury ?

Réforme plombée, pénurie de commissaires : alors que Darmanin semblait, à l’heure où le Palmipède bouclait, bien parti pour rempiler à Beauvau, l’affaire tombe mal. Casse-tête au programme : comment organiser, d’ici à septembre (date de la rentrée), un nouveau concours interne ? En attendant, ça grogne dans les rangs des futurs commissaires…

Les représentants de ce corps ont beau porter des casquettes à feuilles de chêne, ils n’aiment pas trop être pris pour des glands…


Didier Hassoux et Christophe Labbe. Le Canard Enchainé. 18/05/2022


Une réflexion sur “Du cambouis dans les instances policières

  1. jjbadeigtsorangefr 21/05/2022 / 11h38

    Jusqu’où va se nicher la pourriture !

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