Ah, l’image « sociale » du RN !

Hors la préférence nationale, son offre programmatique en la matière est nulle. Et ses élus, eux, professent une conception très singulière du droit du travail.

On se souvient de Grégoire de Fournas, député mariniste de Gironde qui, en novembre 2022, s’était fait prendre à loger dans des tentes des travailleurs étrangers bossant sur son vignoble… Fournas n’est pas le seul lepéniste à avoir mal à son social. La preuve par l’exemple.

Fin janvier, une assistante parlementaire a déposé une plainte contre Romain Baubry, député RN des Bouches-du-Rhône (« Le Parisien », 30/1). Elle accuse cet ancien poulet de 35 ans de lui avoir coincé la main dans une porte lors d’une altercation à la permanence locale, ce qui lui a valu cinq jours d’ITT.

Dans sa plainte, la jeune femme de 23 ans raconte que l’ancien flic, s’imaginant infiltré par des zemmouristes, lui a réclamé son portable professionnel, dont il avait choisi lui-même le code de. déverrouillage. Quand elle a voulu le récupérer, il a quitté la pièce en trombe et lui a claqué la porte sur la main.

Le lendemain, elle a été mise à pied. Motif : « Vous avez fait preuve d’un comportement scandaleux envers ma personne (…). Lorsque j’ai voulu fermer la porte de mon bureau, vous vous êtes jetée sur elle en mettant vos mains dans l’encadrement et votre tête en opposition. Vous coinçant les doigts. » Quelle violence…

Dix jours après son dépôt, la plainte de la jeune femme a été classée sans suite, Après une « enquête de flagrance, j’estime que l’infraction n’est pas caractérisée telle que dénoncée », a justifié le procureur de Tarascon, Laurent Gumbau, un ancien de la maison poulaga dans les Bouches-du-Rhône.

Les élus RN n’ont pas de chance avec le petit personnel. En septembre 2023, Yoann Gillet, député du Gard, est condamné en appel pour le licenciement de son ancienne femme de ménage. Nicole C., 62 ans, a bossé pour lui de 2014 à 2018, parfois sans parvenir à se faire payer en temps et en heure. A de nombreuses reprises, Gillet l’a rémunérée en retard, ou avec des chèques sans provision.

« Négro », c’est trop

A l’époque, il cumulait 6200 euros de revenus mensuels comme directeur de cabinet du maire de Beaucaire et conseiller municipal, communautaire et régional. Lassée de devoir relancer son employeur pour toucher son dû, Nicole a pris un jour l’initiative de « cesser Mes prestations » tant que son salaire ne lui aurait pas été versé. Gillet l’a aussitôt licenciée par SMS : « Vous allez recevoir mon recommandé actant la fin du contrat. »

Aux prud’hommes, en 2021, le courageux député, qui ne s’est pas présenté, s’est vu condamné à verser à Nicole une somme rondelette : 13 000 euros de rappels de salaire, 2 900 euros pour travail dissimulé, et autant en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Mais, en appel, en septembre 2023, les juges se sont montrés beaucoup moins sévères. Gillet n’a plus eu à payer que 2 000 euros à sa femme de ménage en dommages et intérêts. Le député a bénéficié de quelques témoignages amicaux, dont celui d’un proche, Miguel Bruno, directeur du commerce, des festivités et des sports à la mairie de Beaucaire, qui a accusé Nicole C. d’avoir « demandé à être payée en espèces ».

En Occitanie, Bruno Leleu, un conseiller régional, doit comparaître en septembre prochain devant le tribunal de Rodez pour des faits présumés de harcèlement moral et sexuel sur une ancienne employée de sa boîte, Iso d’Oc. Le patron frontiste envoyait à sa commerciale des propositions grivoises, avec promesse de place sur la liste RN aux régionales.

Leleu, lui, parle de « dragouille » et accuse son ancienne équipe de vouloir procéder à un « règlement de comptes ». En mai 2022, une dizaine de ses salariés s’étaient mis en grève pour protester contre les conditions de travail.

Un an plus tard, un ancien secrétaire de chez Iso d’Oc, d’origine congolaise, portait plainte contre Leleu pour injures raciales : son ancien boss le qualifiait dans son dos de « négro ». Sa plainte a été classée sans suite pour prescription de l’action publique.

A l’époque, trois ex-collègues avaient pourtant attesté sur l’honneur avoir entendu le responsable RN local appeler son salarié « le nègre », « blackos » ou « trou du cul de négro ». Dans l’une des attestations consultées par « Le Canard », l’un d’eux indique que Leleu s’était vanté d’avoir recruté « un Noir, car ça fait bien pour le RN ».

Le RN et le social, en tout cas, ce n’est pas tout blanc.


Jérôme Canard. Le Canard enchaîné. 30/04/2024


Une réflexion sur “Ah, l’image « sociale » du RN !

  1. bernarddominik 08/05/2024 / 10h28

    Quelle mentalité !

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