Il ne peut y avoir de paix sociale dans un océan d’injustice sociale.
- Un premier acte politique d’apaisement et de main tendue serait de proposer au Parlement de suspendre ou d’abroger cet article 435-1 du Code de sécurité intérieure.
- Un autre serait de créer immédiatement une commission « Vérité et Justice » associant élus locaux, représentants de jeunes des quartiers, organisations de jeunesse, associations, représentants de la police et de la justice, médiateurs de quartiers et éducateurs, le gouvernement et le Parlement.
Il est urgent de traiter sérieusement les questions relatives aux relations entre l’institution policière et les populations des cités populaires. Celles-là mêmes dont les parents et grands-parents ont contribué à construire la France, celles que l’on retrouve en tête des « premiers de corvée », qui subissent des temps de transport interminables, qui se lèvent tôt et rentrent tard, très tard. La construction d’une police de proximité doivent être mise à l’ordre du jour, maintenant.
Parlons franchement.
Notre pays souffre des reliquats de son héritage colonial. Les populations issues de l’ancien empire sont largement stigmatisées et toujours désignées ou perçues comme suspectes a priori. Il est temps pour notre République de faire un bond en sortant toutes ces questions cachées sous le tapis et de les mettre sur la table, en débat, au grand jour.
Déverser en permanence des discours sur l’« égalité républicaine » à des jeunes pour qui le contact avec les policiers relève de l’injustice permanente, d’humiliations et de l’expression libre du racisme salit notre République, la dénature et conduit à la haine de tout corps constitué, tout représentant d’une autorité ou d’un service.
L’intégration n’est qu’un mot incompréhensible pour un adolescent victime de la ségrégation urbaine et des discriminations, encerclé par la misère et la violence, dont l’avenir ne dépasse pas les murs de la cité.
Ceux qui répètent à l’envi que l’« argent coule à flots dans ces quartiers grâce à la politique de la ville » mentent effrontément. Certes, des efforts importants de rénovation urbaine et d’équipements ont été réalisés sous l’impulsion des municipalités. Le programme de rénovation urbaine né de la loi Borloo n’a coûté que 12 milliards d’euros et non pas 40 milliards, comme le racontent à la télévision, ceux qui habitent les beaux quartiers.
Cette dépense a été financée aux deux tiers par l’Action logement avec un prélèvement sur le 1 % logement, issu de la masse salariale. Le tiers restant a été financé par les collectivités locales et l’État. Ce plan a généré 10 milliards d’euros de recettes de TVA et de cotisations sociales.
Améliorer l’urbanisme, l’habitat, rendre les cités plus agréables, améliorer la qualité environnementale des logements est tout autant indispensable. Ceci ne peut cependant suffire à répondre aux problèmes auxquels sont confrontés les travailleurs et les jeunes de ces quartiers : le chômage, la précarité, la pauvreté.
Sur les 1 514 quartiers prioritaires, où vivent 8 % de la population française, le taux de pauvreté est de 43 %. Le taux de chômage y est de 18,6 %. Plus de 57 % des enfants y sont en situation de pauvreté.
En 2021, M. Jean-Louis Borloo lui-même rappelait que la République accorde à ces territoires « quatre fois moins de moyens qu’ailleurs, rapporté au nombre d’habitants ».
C’est aussi dans ces endroits que le confinement a été le plus difficile à supporter. Après la phase de pandémie, c’est dans ces quartiers que se font sentir le plus durement les hausses de prix, l’augmentation des loyers et des charges, les bonds du prix de l’énergie, la contre-réforme de l’assurance chômage. Bien souvent, dans ces quartiers, le compte en banque est vide le 15 du mois.
C’est là, aussi, que le niveau d’abstention aux élections municipales et législatives est le plus élevé depuis plusieurs scrutins déjà. Cette seule donnée aurait dû et doit sérieusement alerter.
Dans certains cercles, qui ne connaissent strictement rien à ces conditions de vie, on a fait un amalgame grossier et réducteur entre émeutiers et « pilleurs ». Il y en a certainement. Comme il y a vraisemblablement des groupes d’extrême droite qui soufflent sur les braises. Mais, ne devrait-on pas se demander si ces actes répréhensibles ne constituent pas, pour une part, des « émeutes du pouvoir d’achat ».
Il serait utile d’engager un grand débat sur ces enjeux. Pourquoi ne pas porter l’idée d’organiser des « États généraux pour l’égalité et la justice dans les quartiers populaires ».
Au-delà de la poursuite des programmes de rénovation urbaine, un grand combat doit y être engagé pour éradiquer la précarité et le chômage et ouvrir le droit d’accès à l’éducation, au travail, à la formation, à la culture à chacune et chacun de ses habitants, à chaque jeune sans exception.
Comment peut-on dans ces familles accepter d’être stigmatisé tels des « profiteurs » alors que l’on n’y a que de maigres salaires et quelques pincées d’aides sociales.
La campagne forcenée conduite par le pouvoir et le grand patronat contre les « fraudes sociales », stigmatisant les plus déshérités, est une forfaiture quand personne ne s’attaque à la fraude fiscale qui représente l’équivalent de sept fois les moyens du plan de rénovation urbaine.
En cherchant des boucs émissaires et des coupables, en désignant pêle-mêle les parents, les réseaux sociaux et une prétendue « ultragauche », le pouvoir et les médias dominants cherchent un consensus, une union nationale pour le maintien de ces quartiers – comme de la ruralité – en état de soumission, de résignation et d’isolement.
La division doit être combattue. Partout, qu’il y ait des champs d’herbe ou du béton, la pauvreté gagne, avec son interminable cortège de souffrances et de rage. À la campagne comme à la ville, les violences servent toujours aux forces autoritaires pour avancer dangereusement leurs pions.
D’après un texte de Patrick Le Hyaric – Source (Extraits)
Ce ne sont pas les premiers de cordée qui sont allés casser et piller, mais bien ceux qui reçoivent la plus grosse part des aides publiques. La société est effectivement divisée, non pas en 2 mais en 3: 1 ceux qui touchent les aides publiques 2 ceux qui bossent ou ont bossé plus de 40 ans 3 ceux qui touchent le bénéfice du travail
Donc on voit bien que tout repose sur ceux qui bossent et c’est eux qui vont payer le milliard de dégâts, pas les casseurs que nos lois ne rendent pas responsables des dégâts. Pourtant c’est 300000€ que chacun de 3600 arrêtés en flagrant délit devraient payer si le PS n’avait pas abrogé la loi les responsabilisant. Nos lois font rire le monde entier, notre président est ridiculisé, notre justice passe pour être infiltrée par les trotskistes, Patrick le Hyaric me paraît bien naïf, il doit vivre confortablement dans sa villa, et tout ça passe bien loin de ses lunettes de myope.
Je rajouterai que la question n’est pas les 12 ou 40 milliards de la loi Borloo. Même 12 milliards c’est déjà trop. Ils ont qu’à faire comme nous: bosser, il y a plein d’emplois qui attendent des bras. On les logé pour presque rien, une famille de 3 enfants, sans travailler, touche près de 1900€ mensuels. S’ils veulent des bmw et des Mercedes c’est pas à nous de les payer.
C’est ton avis Bernard et comme tout à chacun, tu es en droit de l’exposer.
Cette série de manifestations faisant suite à l’agissement d’un policier tirant sur un conducteur pourtant non armé (les différents récits et vidéos étant concordant) n’est pas que la résultante de cette affaire (qui sera jugée… un jour… bien ou mal, ce sera une autre histoire).
En ne voyant pas qu’il s’agit bien de l’ » explosion » d’un malaise généralisée, c’est sûr, la cécité gagne une grande partie de la population. Ne pas vouloir résoudre les problèmes de ghettoïsations, de pauvreté, de communautarisme en laissant dire par une droite sectaire et une extrême droite aux aguets (exigeant de faire régner l’ordre façon dictatorial). Nous occultons la cause.
Entendons-nous, pour autant, il n’est pas question de cautionner les actes de pillages, destructions, etc.
D’un côté les riches n’ont jamais été aussi riches, de l’autre la pauvreté s’entend chaque jour un peu plus dans différents secteurs.
Alors oui, la position le P. Le Hyaric est peut-être contestable, mais elle mérite l’étude par le plus grand nombre d’entre nous.
Michel
Mais les « premiers de cordée » pillent tous les jours impunément.
« Quand l’injustice devient loi, la rébellion devient devoir. » Th. Jefferson
Je ne connaissais pas cette citation de Thomas Jefferson, merci de l’avoir indiqué.
Amitié
Michel