Un homme, un juriste simplement humain.

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Ce discret amendement menace…

… le travail des journalistes


L’enfer est pavé de bonnes intentions.

Les députés ont maintenu mercredi une disposition, proposée par le Sénat, qui étend le délai de prescription pour diffamation de trois mois à un an lorsque la victime est élue ou candidate à une élection au moment des faits. Cette disposition, adoptée en octobre 2023 à la chambre haute par un amendement de la sénatrice LR Catherine Di Folco et du groupe socialiste, est inscrite dans une proposition de loi sénatoriale bien plus large visant à renforcer la sécurité et la protection des maires et élus locaux. Cette dernière fait suite à de nombreuses violences à leur encontre, notamment les attaques d’extrême droite qui avaient conduit à la démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (Loire-Atlantique), en mai 2023.

Mais la disposition, qui modifierait la loi du 29 juillet 1881 qui consacre la liberté de la presse, fait l’unanimité contre elle du côté des syndicats de journalistes. Ces derniers y voient « une loi d’exception pour les seuls élus », dans un communiqué publié mercredi à la suite d’un article du site Mediapart révélant les faits.

« Une épée de Damoclès sur le traitement de l’actualité politique »

Les interventions des syndicalistes depuis mercredi commencent à porter leurs fruits. Les élus de gauche se sont dissociés du vote, le représentant socialiste reconnaissant une erreur de ses collègues du Sénat. Une table ronde avec les organisations de la profession, peut-être même avec celles patronales, pourrait être organisée à l’Assemblée avant la commission mixte paritaire qui devrait mettre au diapason les versions du texte votées par les députés et les sénateurs. Après discussion avec la rapporteure du texte, la députée Renaissance Violette Spillebout, les syndicalistes espèrent voir l’amendement abrogé.

Si l’article 2 bis, celui au cœur de la controverse, était maintenu en l’état, les conséquences pourraient être graves pour l’équilibre de la loi de 1881. « Le rallongement du délai de prescription mettrait une épée de Damoclès sur le traitement de l’actualité politique avec le risque de voir, durant un an, un élu s’en prendre à un ou une journaliste ou à un éditeur de presse si, à la suite de son mandat, il venait à subir les conséquences d’informations délivrées par un organe de presse », dénonce le communiqué signé des syndicats SNJ, CFDT et le SGJ-FO.

L’Association des avocats praticiens du droit de la presse partage l’analyse et précise que « ce délai de prescription (de trois mois – NDLR) est considéré par la jurisprudence comme étant d’ordre public » et a été validé par la Cour européenne des droits de l’homme en mars 2023.

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Gaël De Santis. Source (Courts Extraits)