Les relations entre Emmanuel Macron et les diplomates n’ont jamais été au beau fixe. Le Président a toujours eu quelque peine à « échanger avec ces professionnels » (formule de l’un d’eux), et ces derniers se sont souvent plaints de ne pas être « entendus ».
En vertu du « domaine réservé » que lui confère la Constitution, Macron, dont la modestie n’est pas le moindre défaut, considère qu’il a les connaissances requises en politique étrangère — « qu’il s’agisse de Poutine ou du Sahel », se moque un diplomate. Et il consacre très peu de son précieux temps à la lecture des télégrammes des ambassadeurs, ainsi qu’aux notes et analyses produites par les « directions géographiques » du Quai d’Orsay.
Très récemment, le malaise s’est encore accru entre l’Elysée et ce ministère. La rédaction d’une note confidentielle très critique en fournit la preuve. Et « Le Figaro » y a consacré sa une, le 14 novembre (un jour avant la parution de cet article).
Selon des informations obtenues par « Le Canard », une quinzaine de diplomates de haut niveau — ambassadeurs, consuls, etc. —, en poste, pour la plupart, au Moyen-Orient, ont pris cette initiative sans aucun précédent. Ils mettent en cause les « positions déséquilibrées de l’Élysée », qu’ils estiment trop favorables à Israël et préjudiciables à l’image de la France dans les États arabes.
Il ne s’agit donc pas de banals griefs. Au risque de provoquer une colère jupitérienne, ces diplomates considèrent que le Président porte atteinte à l’audience et à la crédibilité de la France, et ne tient pas compte de la sécurité de ses concitoyens expatriés.
Bref, le contenu de cette note est « en rupture avec l’Élysée », confie un diplomate qui s’attend à voir certains de ses collègues rejoindre les premiers auteurs.
Car, au fil des jours, Macron a souvent changé de pied. Après avoir proposé la formation d’« une coalition internationale contre le Hamas », puis y avoir renoncé, il a reconnu le « droit d’Israël à se défendre », puis affirmé que la destruction du Hamas était sa « priorité ».
Ensuite, il s’est voulu « thérapeute humanitaire », et, lors de la conférence organisée à Paris le 9 novembre, 1 milliard d’euros a été recueilli en promesses pour Gaza. Enfin, alors qu’il se limitait à réclamer « une pause humanitaire », Macron a soudain demandé que la communauté internationale « œuvre à un cessez-le-feu ».
Voilà qui ne ressemble guère à une expression très réfléchie…
Claude Angeli. Le Canard enchaîné. 15/11/2023