La face cachée du milliard d’arbres à planter
Il y a un an, Sa Seigneurie présidentielle Macron annonçait la plantation de 1 milliard d’arbres en France d’ici à 2032. 10 % de la forêt française. Selon la prose officielle, « pour sécuriser les services économiques, écologiques, climatiques et sociétaux rendus par les forêts ».
Notons sans trop d’acrimonie que l’économie, comme de juste, passe avant l’écologie, même dans les messages de propagande. Ajoutons que le gouvernement s’apprête à préciser concrètement la place de la forêt dans ce qu’il appelle la « planification écologique ».
Après tout, si ce milliard était une bonne idée ? Hélas. Une tribune toute récente, signée par plus de 600 défenseurs des forêts, dont nombre de scientifiques, taille en pièces – diplomatiquement en effet – le programme présidentiel (1).
En somme comme en résumé, il existe deux approches inconciliables : le bulldozer ou les doigts de fée. Pour Macron et ses amis, la forêt doit avant tout cracher du bois. C’est pourquoi il existe encore tant de coupes rases, hérésie écologique s’il en est. La machine veut cramer du bois. Pour faire voler les avions à partir de « biocarburants » venus du bois. Pour remplacer le charbon dans les centrales thermiques. Jamais il n’est question d’interroger la consommation globale de bois, encore moins de la réduire.
L’autre approche nécessite la modestie, l’étude de terrain, le respect des écosystèmes forestiers. Mais ce sera pour une autre fois. Dans les coulisses, des personnages comme Julien Denormandie, chouchou de Macron et ancien ministre de l’Agriculture, sont aux commandes.
L’ancien corps des Eaux et Forêts – désormais uni à celui des Ponts – décide au nom de la société française, sans lui rendre le moindre compte. Finissons par quelques mots du grand botaniste Francis Hallé2, dont nos maîtres n’ont que foutre : « Suffirait-il qu’un terrain soit couvert d’arbres pour que l’on puisse parler de forêt ? » Et : « Cette confusion entre forêts et plantations d’arbres avantage les industriels du bois ou de la pâte à papier, qui accaparent les terres libres. »
Fabrice Nicolino. Charlie hebdo. 08/11/2023