Triste mois…

  • Un mois tout juste, un mois déjà, depuis les attaques du Hamas, le 7 octobre, dans le sud d’Israël.
  • Un mois et pas un jour, dans l’État hébreu, bien sûr, mais aussi chez les Juifs du monde entier, sans avoir en tête l’effroyable barbarie de ces massacres terroristes.
  • Un mois également que la guerre contre ceux qui les ont programmés et perpétrés se poursuit, s’intensifie, se durcit.
  • Un mois aussi que des milliers de civils palestiniens qui n’en demandaient pas tant en endurent, « collatéralement » et sans répit aucun, l’infernal coût humain.

Mais, toujours dans le même temps de ce maelström délétère déclenché par le Hamas, un mois que se multiplient, en prenant prétexte de la riposte écrasante des forces israéliennes à Gaza et de ses dommages sur les civils, les tags de provocation, les agressions et autres expressions haineuses d’un antisémitisme de plus en plus défiltré.

Ce phénomène est mondial et frappe de l’Allemagne aux États-Unis en passant par la France, qui, avec la plus importante communauté juive d’Europe, n’est pas la moins concernée. Plus de 1 000 cas ont été recensés en un mois et pas loin de 500 interpellations opérées.

Cet antisémitisme a des racines protéiformes. Si le chef du Rassemblement national, Jordan Bardella, se présente sans rire en « bouclier pour les Français de confession juive », son parti, même repeint aux couleurs de la dédiabolisation puis de la banalisation, conserve plus d’une ambiguïté sur le sujet.

Le même Bardella affirme ainsi, dans la foulée, « ne pas croire à l’antisémitisme de Jean-Marie Le Pen », alors que ce dernier, en son temps, a été condamné pour de tels faits et a fondé le Front national avec un ancien Waffen SS de la division Charlemagne, Pierre Bousquet. On croit Bardella sur parole !

C’est d’ailleurs ce qu’a fait Olivier Faure pour le Parti socialiste en invitant dans un premier temps, au grand dam de son parti, le RN à défiler ce dimanche contre l’antisémitisme. Ce qui a aussitôt servi de prétexte à Jean-Luc Mélenchon pour se défiler sans défiler avec les autres partis.

Il veut bien flatter l’électeur dans les cortèges antisionistes où sont proférés des slogans antisémites de l’is­lam radical mais pas manifester contre l’antisémitisme, même si le RN n’est plus convié dans le cortège. L’insoumission, c’est un métier.

Mais, au-delà de ses formes diverses et de ses instrumentalisations variées, cette pestilente vague d’actes antisémites, quelles que soient ses origines, a, par son ampleur, sérieusement de quoi alarmer dans nos contrées. D’autant que, au vu des réactions pour le moins binaires provoquées par cette attaque terroriste et par la guerre sans merci qu’elle a déclenchée, elle semble à l’évidence encore bien loin d’être sur le point de prendre fin.

Cette recrudescence n’est pas plus tolérable que, dans l’autre camp, l’ostracisation sans nuance des Palestiniens, facilement perçus comme des terroristes potentiels, que, du Liban à l’Égypte en passant par la Jordanie, les pays voisins d’Israël, reprochent aux États-Unis comme à l’Europe et donc à la France.

Ces deux formes de haine et la peur qu’elles suscitent ne sont pas recevables, mais, là encore, le Hamas y a, dans le second cas comme dans le premier, plus que salement contribué.


Erik Emptaz. Éditorial. Le Canard enchaîné. 08/11/2023


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