Est-il l’empêcheur de tourner en rond, celui qui entendait changer la constitution, qui appelle à la solidarité du peuple français en décidant seule de son bienfait. Le tribun ayant perdu son « aura », celui qui souhaitait révolutionner la solidarité, l’entente entre les différentes strates de la société française, s’est-il trop pris pour Dieu le père, situation orchestrée par l’adulation statufiée de son proche entourage de béni-oui-oui, au point de le faire sortir d’habits et d’hologrammes devenus trop grands, aux hardes flottantes au vent… MC
La Nouvelle Union populaire, écologique et sociale voulue par le chef de LFI… vient d’exploser à cause de lui !
Ça y est, elle gît à terre comme une vieille peau, la Nupes. Les couteaux sont sortis. Mélenchon, l’âme de cette alliance, estime désormais qu’ « un point de non-retour a été franchi ». La semaine dernière, la patronne des écolos, Marine Tondelier, lui avait demandé de bien vouloir cesser de tweeter. Comme un vulgaire Trump. Comme un pépé hargneux assis en bout de table, un peu largué, et dont les interventions cassent l’ambiance. Ruffin le recadre sur le Hamas, Roussel cogne comme un sourd, et même Faure, qui n’est pourtant pas du tout certain de conserver son fauteuil de député sans l’appui de LFI en 2027, appelle à un « moratoire ». Jean-Luc, tu te calmes, on se reparle plus tard, quand tu auras pris tes cachets, ok ?

La Nupes est en fait morte le 28 janvier 2023, à Marseille. Ce jour-là s’achève le congrès des socialistes.
La réélection d’Olivier Faure, chaud partisan de l’alliance avec Mélenchon, ne tient qu’à un cheveu. Il lui faut partager le pouvoir avec Nicolas Mayer-Rossignol, le maire de Rouen, opposé à l’alliance. « A ce moment-là, Mélenchon comprend que c’en est fini de l’union de la gauche autour de lui. L’opposition à la Nupes au sein du PS est trop forte, Faure n’a plus les mains libres. Le PS ne va plus être un allié fiable et le PC n’attend qu’une occasion pour ruer dans les brancards. Il estime alors que le jeu n’en vaut plus la chandelle et choisit le durcissement », raconte un baron socialiste, vieux compagnon de route de tous les protagonistes.
Ça, franchement… c’est du frontal !
Pourquoi le durcissement ?
« Mélenchon anticipe, comme d’autres, l’inéluctable basculement du pays vers une droite dure. Dans ce cas-là, autant incarner une opposition frontale pour remporter la mise à gauche », ajoute le même. D’où la radicalisation du propos au moment de l’affrontement sur les retraites, lorsque éclatent l’affaire Nahel et les émeutes dans les banlieues, puis lors de l’offensive terroriste du Hamas.
La Nupes a d’autant moins de chances de ressusciter que le calendrier n’est pas porteur. Les prochaines élections sont les européennes, en juin 2024, où la gauche part en ordre dispersé, puis les municipales, en 2026, où les alliances se feront à la carte, en fonction des situations locales. « Peu de chances que les socialistes et les écolos, qui ont des mairies à défendre, fassent des cadeaux aux Insoumis », rigole un député écolo.
La Nupes n’est plus, mais tous ces grands courageux se gardent bien de le dire. Surtout ne pas prononcer le mot de « rupture ». Le premier qui le dit est mort, l’électorat de gauche ne le pardonnerait pas, alors on finasse. Le PS se cache derrière son « moratoire », le PC tape fort sur le tambour… tout en s’abstenant de quitter la coordination Nupes à l’Assemblée. Les écolos, dont le parti est aimablement qualifié par certains camarades de gauche de « bateau sans gouvernail », ne savent pas où ils vont. « Ils ne se sont toujours pas remis de l’échec de Jadot à la présidentielle. Ils oscillent sans cesse entre une ligne Jadot et une ligne Rousseau. » Bref, Mélenchon les impressionne encore. « Il a fait 22 % à la présidentielle, il est encore à 10-12 % dans les sondages, il continue d’aimanter le débat politique, alors ils reculent tous », rigole Jean-Christophe Cambadélis, ancien patron du PS sous Hollande.
Il verrouille, disperse, ventile…
Les candidats à la succession se préparent pourtant. Il y a ceux qui pensent ressortir à terme les vieux oripeaux, soutenant que, dans le fond, le problème, c’est Mélenchon, pas la Nupes. François Ruffin, député Insoumis de la Somme, est de ceux-là. « Il incarne très bien une France insoumise à visage humain, François, quand il fait ses petites vidéos dans sa cuisine ; il tente d’être le point d’équilibre de toute la gauche, mais il fait comme si Mélenchon n’avait pas totalement verrouillé le parti ! Toutes les personnalités, Corbière, Autain, etc., ont été exclues de la direction », rappelle un député LFI.
Chez les Insoumis, Mélenchon, soutenu par la base et par de jeunes parlementaires qui lui doivent tout, ne peut être viré. Olivier Faure, avec son fameux « moratoire », prend bien soin, lui aussi, de ne pas signer trop tôt l’acte de décès. « Ça nous fait doucement rigoler en interne, mais c’est vrai que Faure s’y voit pour 2027 », s’amuse un sénateur socialiste. Roussel se tait, obsédé par l’idée de sortir son parti des limbes et de dépasser — enfin — les 5 % aux européennes.
Des dialogues qui n’en sont pas, des personnages impuissants qui évoluent dans un décor dévasté et rêvent d’en tuer un autre sans passer à l’acte, un sentiment persistant d’absurdité..
C’est du Beckett, c’est « Fin de partie ».
Anne-Sophie Mercier. Dessin de Kiro. Le Canard enchaîné. 25/10/2023

Dès les premiers mots, avant même que son nom ne fût cité, on l’avait démasqué, il s’agissait forcement de Jean Luc Mélenchon