EDF serait-il en train de confondre vitesse et précipitation pour faire démarrer — après douze ans de retard — son EPR de Flamanville lors du premier semestre 2024 ?
C’est la question posée par les inspecteurs de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui ont envoyé à l’électricien un courrier un brin alarmé.
De fait, pour arriver à boucler en six semaines les essais de qualification du réacteur, entamés le 2 octobre dernier, EDF a grillé quelques étapes. « De nombreuses activités, identifiées initialement comme préalables [aux essais], ont été reportées, faute de temps, à une phase d’essais postérieure », soulignent les inspecteurs.
Plus ennuyeux : histoire de gagner du temps, les ingénieurs de Flamanville ont zappé l’installation d’une pompe de secours, dont le montage attendra quelques mois.
Mieux encore : EDF a décidé de reporter d’autres phases de test, sans en donner la raison au préalable.
Conséquence ? Les inspecteurs, qui ont trouvé la méthode un tantinet cavalière, n’ont pu que recueillir « oralement » les justifications ! En guise de bouquet final, ils ont découvert que la durée de validité de certains capteurs, utilisés par l’électricien pour tester ses engins, allait expirer en plein milieu de la campagne d’essai. Quel talent !
L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a mis, lui aussi, son grain de sel dans le chaudron de Flamanville. Dans un avis rendu le 4 septembre à la demande de l’ASN, ses experts s’inquiètent d’un risque d’« explosion interne » dans le système destiné à traiter les effluents gazeux issus du coeur nucléaire. EDF a bien tenté de les calmer en dégainant des études censées démontrer qu’une explosion n’aurait aucune conséquence grave.
Pas de bol : ces garanties ont été jugées insuffisantes par l’IRSN, qui s’interroge désormais sur un possible écroulement de plusieurs locaux techniques en cas d’explosion. Mais pourquoi donc s’angoisser pour si peu ?
Hervé Liffran. Le Canard enchaîné. 18/10/2023
La faillite de notre industrie nucléaire est patente. Les EPR ne sont visiblement pas au point. On ne sait plus faire des cuves, des soudures, des pompes… c’est comme la fameuse hélice du Charles de Gaulle, qui cavitait. Triste constat d’une décadence