CELLES QU’ON OUBLIE
Celles qu’on oublie ont les yeux rougis
Par la fatigue et par les veilles,
Dans leur misérable et triste logis
Leurs doigts légers font des merveilles.
Dans ce grand rucher qu’est notre pays
Où les modes sont sans pareilles,
Dites-nous, patrons, quels sont les profits
Q’en tirent ces pauvres abeilles ?
C’est un salaire
De misère,
Que vous leur donnez, ô patrons,
Il faut relever ce salaire,
Afin qu’un peu de joie éclaire
Ces sombres fronts !
Celles qu’on oublie
Ont faim,
Celles qu’on oublie
Ont droit à la vie,
Donnez-leur du pain !
Celles qu’on oublie ont les traits creusés
Par les soucis et par les craintes,
Leurs rêves sont morts, leurs espoirs brisés,
Elles luttent sans pleurs ni plaintes.
Riches, savez-vous quel gain, tous les jours,
Touchent ces femmes et ces filles,
Quand leurs mains ont fait les jolis atours
Dont font parade vos familles ?
Celles qu’on oublie ont le cœur
meurtri Par l’injuste et rude souffrance,
Leur visage maigre, exsangue et flétri,
Reflète leur désespérance.
Puissants, il vous faut secouer le joug
D’une coupable indifférence,
On ne laisse plus les brebis au loup
Dans le noble pays de France.
Plus de salaire
De misère,
Imposé par les exploiteurs.
Il faut qu’une loi salutaire
Assure un honnête salaire
Aux travailleurs.
Celles qu’on oublie
Ont faim,
Celles qu’on oublie
Ont droit à la vie
Donnez-leur du pain
Francine Lorée–Privas