Un engagement…

… l’avis d’une personne, sur des sujets de société, « posté » au titre de la réflexion... pourrait déplaire ou trouver raison. MC

« La plus volontaire mort, c’est la plus belle », disait Montaigne. Jean-Luc Roméro-Michel s’est promis de tout faire afin que personne ne soit plus jamais contraint de fuir son pays, tel un paria, pour mettre fin à ses jours.

L’homme politique (conseiller régional Île-de-France RPR – UMP, puis adjoint PS à la mairie de Paris) n’en est pas à son premier combat. Il a été le premier élu à révéler sa séropositivité.

  • Qu’est-ce qui vous a poussé à vous engager dans ce combat pour mourir dans la dignité ?

Je suis très entouré par la mort depuis ma naissance. D’abord celle de mon père. Quand j’avais 14 ans, il a eu un cancer des poumons et il s’est étouffé devant moi, à la maison. L’année suivante, ma grand-mère a eu un médecin compatissant qui lui a permis de partir sans souffrance.

Lorsque j’avais 20 ans, j’œuvrais bénévolement à Fréquence Gaie, la première radio homosexuelle, et j’ai vu mourir du sida beaucoup de mes amis dans des conditions absolument atroces. J’ai accompagné mon premier amour. Il a passé une nuit à hurler de douleur à l’hôpital – le personnel soignant refusant de lui donner de la morphine – avant de tomber dans le coma alors qu’il ne demandait qu’une chose : partir. Je suis moi-même concerné puisque j’ai appris en 1987 que j’étais séropositif.

Je pensais que j’étais condamné, que je ne connaîtrais jamais mes 30 ans. Je suis un survivant. Avoir côtoyé la mort et y être confronté très jeune m’a fait comprendre qu’il fallait profiter de la vie et mieux aimer les gens autour de soi. S’occuper de la mort, c’est mieux vivre.

  • Un projet de loi devrait être présenté ce mois de septembre sur la fin de vie. Comment vous inscrivez-vous dans cette démarche ?

Comme les femmes scandaient à une époque « Mon corps m’appartient », les Français disent aujourd’hui « Ma mort m’appartient » à 90 %, sans être pour autant des militants de l’euthanasie. L’opinion est prête depuis longtemps. En avril, près de 80 % des membres de la convention citoyenne sur la fin de vie se sont prononcés en faveur d’une aide active à mourir.

Et depuis le dernier mandat, l’Assemblée nationale y est favorable. En 2021, l’article 1er de la proposition de loi d’Olivier Falorni pour créer une « assistance médicalisée active à mourir » a été voté par 82 % des députés présents. Emmanuel Macron, qui s’y est longtemps opposé, va sûrement proposer une loi a minima. Avec un texte qui ne concernera que les soins palliatifs. J’espère au moins qu’il sera accompagné de moyens.

  • Que revendique l’Association pour le droit de mourir dans la dignité dont vous êtes le président d’honneur ?

Notre combat, c’est l’accès universel aux soins palliatifs. Et s’il y a bien un consensus dans la société, c’est celui-là. Or, en 2023, il y a encore 21 départements qui n’ont pas d’unité de soins palliatifs. Un vrai scandale. Parce que, si on veut, on peut se donner les moyens. Même l’Angleterre, avec son système de santé que personne n’envie, est bien meilleure que nous. C’est un des paradoxes de la France.

[…]

  • Quand vous parlez d’une loi a minima, que craignez-vous ?

Emmanuel Macron veut faire un plan sur dix ans. Pourquoi ? Il faut un plan quinquennal, et qu’on y mette les moyens. Avec, dans un premier temps, des soins palliatifs dans chaque département. Les lits identifiés en soins palliatifs doivent être une réalité, et non des inscriptions budgétaires comme c’est le cas aujourd’hui. Mais cela ne résout pas toutes les situations. C’est bien pour cela qu’il faut ce soin ultime qu’est l’euthanasie ou le suicide assisté.

Les pays qui nous entourent, les Pays-Bas, le Luxembourg, la Belgique, la Suisse, l’Espagne, l’Autriche ou bien le Portugal, ont davantage de soins palliatifs que nous. Donc, tous ces arguments qui avancent que dès que l’euthanasie existe, il n’y a plus de soins palliatifs, ne tiennent pas la route. On sait très bien que si on a une très grave maladie, on mourra à 96 % en soins palliatifs. L’euthanasie ne représente 2 % à 3 % des cas. Cela doit être une liberté offerte aux gens.

  • C’est aussi une histoire d’équité. Avec de l’argent, on peut aller en Suisse pour choisir sa mort…

Se faire euthanasier en Suisse revient à 14 000 euros environ. Si vous êtes riche, vous avez des solutions. […]

  • L’Ordre des médecins se dit défavorable à la participation des médecins à l’euthanasie…

Un médecin n’ira jamais contre son éthique. Il suffit d’instaurer une clause de conscience : aucun soignant n’est obligé d’exécuter ce soin ultime. Il y a en France une grande hypocrisie avec la sédation profonde et continue où on arrête d’alimenter et d’hydrater. C’est le médecin qui va accélérer ou pas les choses. Et beaucoup mettent trois semaines à mourir.

Un récent sondage montre que 60 % des médecins sont favorables à l’euthanasie. […]

  • Pourquoi la France est-elle souvent à la traîne sur ces questions sociétales ?

Notre classe politique a longtemps été composée d’hommes et ces questions ne sont pas assez nobles pour eux, voire leur font peur. Parler de la mort, de la maladie, c’est un aveu de faiblesse. Par ailleurs l’église, mais aussi le système mandarinal jouent un rôle important en France. Toutes les religions sont représentées dans les instances éthiques. Et la plupart du temps, les ministres de la Santé œuvrent dans le milieu de la santé et sont soumis aux lobbies médicaux.

[…]


Nadège Dubessay. Source (Extraits)


2 réflexions sur “Un engagement…

  1. Anonyme 23/09/2023 / 13h58

    Je crois surtout qu’avec pour épouse la dévote Brigite ex prof chez les cathos, notre macrounet ne veut pas aller contre les volontés du grand manitou de Rome, dont les pouvoirs vont bien au delà des apparences.

    • Libres jugements 23/09/2023 / 15h37

      Merci pour ce commentaire.
      Juste une restriction perso, je suis, peut-être à tort, réservé dès que je vois « anonyme ».
      Merci pour un éclairage via mon adresse mail (voir dans « accueil »)
      Cordialement
      Michel

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