La rentrée et une gauche « si gôche »

Il y a des rentrées plus euphoriques que d’autres.

L’an dernier, la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes, alliance des groupes de gauche à l’Assemblée nationale) entamait la première année de quinquennat, forte de sa puissance numérique : 175 députés face à une majorité relative pour le clan Macron.

Un an plus tard, l’euphorie a laissé place à la soupe à la grimace.

Très mobilisée contre la réforme des retraites, dans l’hémicycle et dans la rue, la Nupes n’a pas empêché le passage à 64 ans et s’est plus distinguée pour ses divisions que pour ses propositions.

Rentrée éclatée

La rentrée des quatre partis de gauche qui se réunissent cette fin de semaine est donc cruciale. Europe Écologie-Les Verts (EELV) au. Havre, La France insoumise (LFI) à Châteauneuf-sur-Isère dans la Drôme, le Parti communiste (PC) à Strasbourg et le Parti socialiste (PS) à Blois : les ateliers des universités d’été et les rencontres informelles entre les dirigeants politiques seront décisifs pour répondre à la question suivante : stop ou encore la Nupes ?

L’été a mis en exergue les divisions de la gauche qui sont si criantes qu’elles ne se cachent plus. Elles se sont même étalées sur les réseaux sociaux. Sur X (anciennement Twitter), Jean-Luc Mélenchon (LFI) et Olivier Faure (PS) se sont invectivés une partie de l’été. Les divisions ne sont plus privées et mettent au grand jour tout ce qui divise la gauche.

Union à géométrie variable

En cause, il y a notamment les deux prochains rendez-vous électoraux. Le premier arrive vite : en septembre, les grands électeurs renouvelleront à moitié le Sénat. Les insoumis, qui ne disposent que peu d’élus locaux ont été écartés des scrutins de listes dans les départements concernés par les trois autres partis : PS, Verts et communistes.

Le second est capital pour la survie de la Nupes et aura lieu en juin : Jean-Luc Mélenchon et Manuel Bompard (coordinateur de LFI) veulent une liste Nupes aux européennes, comme pour les législatives. Mais les écologistes, traditionnellement fort dans le scrutin communautaire, ont déjà annoncé leur volonté d’indépendance. « Dans les mots, ils disent qu’il faut s’unir mais dans les faits, ils organisent la division », enrage dans nos colonnes Manuel Bompard.

Mélenchon : stop ou encore ?

La réalité est que l’intergroupe fonctionne à l’Assemblée, malgré des votes parfois divergents, mais en dehors l’union devient compliquée, notamment à cause des sorties à répétition de Jean-Luc Mélenchon, loin d’être toutes consensuelles chez ses partenaires. L’acte II de la Nupes, souhaitée par les partenaires de LFI, a pour but de rééquilibrer les forces au sein de cette alliance de gauche. « Si on n’est pas capable de faire cet acte II, ce sera Marine Le Pen à l’Élysée en 2027», prévient un responsable socialiste. Le même clarifie : « Cet acte II n’est pas contre Jean-Luc Mélenchon. Mais il a le sentiment que la Nupes l’entrave dans sa radicalisation ».

D’où la question qui fera l’objet de conciliabules lors de ces journées de rentrée de la gauche : Jean-Luc Mélenchon veut-il vraiment que la Nupes, qu’il a créée, continue d’exister ? « Mélenchon ça ne se passe pas bien avec tout le monde », confie une cadre d’EELV. Comme certains, elle pense que Jean-Luc Mélenchon a en tête une quatrième candidature en 2027 et que l’alliance des gauches l’entrave. Car qui dit alliance, sous-entend primaires de la gauche, ce dont ne veut absolument pas Mélenchon. Et au sein même de LFI, une quatrième candidature de Mélenchon ne fait pas l’unanimité.

Officiellement, ce dernier est « en retrait mais pas en retraite ». Au soir du premier tour de la présidentielle, il avait lancé, bravache : « Faites mieux ! » Pour l’instant, personne d’autre que lui à gauche ne peut faire 20 % et avoir un ticket d’accès au second tour. Ça le rend incontournable. Jusqu’à quand ?


Nathalie Mauret. Le Dauphiné Libéré. 22 4/08/2023


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