… encore, toujours… mais une usine toute neuve ne produisant que de l’aspirine !
Ampicilline, anticancéreux, antidiabétiques… Le point commun de tous ces médicaments ? Ils sont très utilisés, parfois vitaux, mais sont difficiles à trouver. En 2022, plus de 3 700 ruptures et risques de rupture d’approvisionnement ont été signalés, contre 700 en 2018. La situation est si grave que l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a ouvert une page consacrée à la disponibilité des produits de santé (1).
Lors de la pandémie de Covid-19, le président de la République nous annonçait qu’on allait tout relocaliser, à commencer par les médicaments. Mais, en septembre 2020, 75 % des professionnels soignants interrogés par la Ligue contre le cancer déclaraient que « les pénuries de médicaments utilisés contre le cancer entraînent une perte de chances pour les personnes malades (2) ». Laisser mourir les cancéreux, voilà notre projet !
Les causes de la situation sont connues : des médicaments dits « matures », dont les brevets sont libres, et donc peu rémunérateurs pour les laboratoires ; une très forte concentration de la production au sein d’un petit nombre de labos, principalement situés en Chine et en Inde ; une forte hausse de la demande mondiale, liée à la hausse de la population, à son vieillissement et à l’incroyable enrichissement des dernières décennies.
Les conclusions de la commission d’enquête sénatoriale sur le sujet, rendues le 6 juillet dernier, sont impitoyables : absence réelle de politique, aides accordées aux entreprises sans contrôles ni contreparties, etc (3). Et le pire est à venir puisque, à l’opposé de toute réindustrialisation, la production de pas moins de 700 médicaments, dont certains « d’intérêt thérapeutique majeur », c’est-à-dire essentiels, va être gaiement abandonnée par les gentils entrepreneurs français dans les mois et les années qui viennent.
Certes, le gouvernement dit agir, par exemple en « obligeant » les industriels à mettre en place des « plans de gestion des pénuries » sur ces médicaments cruciaux. Mais lorsque le Sabril, un antiépileptique vital, produit par Sanofi, devient introuvable en mai 2022, ben, rien ne se passe. Et des exemples comme cela, il y en a des cartons entiers. Bref, même lorsque des vies sont en jeu, la doctrine du gouvernement reste la même : on ne contraint jamais une entreprise, qui doit rester libre comme un oiseau.
La commission pointe la dérive, mille fois documentée, du crédit d’impôt recherche (CIR), qui permet aux entreprises de déduire leurs dépenses de « recherche » de leurs impôts. Ce sinistre CIR nous coûte 7 milliards d’euros par an, près du double du budget du CNRS, et il est filé aux boites sans qu’aucun contrôle ne soit assuré.
Que faites-vous si l’État vous donne de la thune sans rien vérifier ? Au mieux n’importe quoi, au pire, vous fraudez (4). Eh bien, c’est ce que la commission d’enquête a constaté à propos de l’industrie pharmaceutique, second secteur bénéficiaire dans le pays, où le saint CIR n’a « ni empêchées délocalisations » ni même « réussi à ancrer la production en France de médicaments innovants (3) ».
Les solutions ? D’abord et surtout l’interdiction des produits toxiques aujourd’hui présents dans notre bouffe, nos vêtements et nos maisons, afin de ne pas tomber malade.
Ensuite une réelle politique de santé publique, contraignante, hein, pour être en bonne santé.
Enfin, un pôle public du médicament, pour sortir nos vies des griffes des directeurs de laboratoire, à côté de qui les pires méchants dans James Bond sont des Bisounours.
Gilles Raveaud. Charlie hebdo. 09/08/2023
- ansm.sante.fr/disponibilites-des-produits-de-sante/ medicaments
- « L’article à lire pour comprendre la pénurie de médicaments en France », par Florence Morel (francetvinfo.fr, 20 février 2023).
- « Pénurie de médicaments : « En France, il n’y a pas de pilote dans l’avion » », par Nathalie Raulin ( Libération, 6 juillet 2023).
- Lire l’enquête de la cellule investigation de Radio France : « Crédit impôt recherche : une niche fiscale hors de contrôle », par Marjolaine Koch (28 avril 2017).
On est gouvernés par des énarques. Quand les Français auront compris que ces gens sont « maqués » avec le grand capital, ils comprendront qu’on doit commencer par remettre chacun à sa place et interdire le mélange des genres.
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