Des sous pour un tueur !

D’ordinaire, une cagnotte en ligne, c’est un instrument de solidarité, un témoignage de générosité, un gage de fraternité.

L’extrême droite a réussi à pourrir l’initiative et à la transformer en arme de diffusion massive de haine.

C’est à ça qu’on la reconnaît, l’extrême droite partout où elle passe, elle change le beau en laid et l’or en plomb. L’alchimiste en chef est un certain Jean Messiha, énarque, traître à Marine Le Pen, rallié à Zemmour pour le pire sans le meilleur.

Habitué des plateaux des télés Bolloré, il a eu l’idée, le 30 juin 2023, d’une cagnotte pour la famille du policier qui a tué Nahel, un fonctionnaire « qui a fait son travail et qui paie aujourd’hui le prix fort »

Autrement dit, le motard, mis en examen pour homicide volontaire et placé aujourd’hui en détention provisoire, n’aurait fait que son job, qui consiste donc à tuer des gamins de 17 ans désarmés et sans casier judiciaire. Une grosse provocation qui encombre jusqu’à certains syndicats de flics. Mais elle fonctionne.

La cagnotte a vite gonflé, poussée par CNews, la chaîne Bolloré venue à la rescousse, par tous les réseaux d’extrême droite et approuvée par Eric Ciotti, le patron de LR.

La tirelire est devenue une preuve d’amour à l’endroit de l’ordre et des forces de l’ordre, le rendez-vous des peureux et des haineux.

À l’heure du bouclage du canard, elle dépassait le million d’euros. Une somme que Messiha mettait, bien sûr, en regard avec la cagnotte de soutien à la mère de Nahel, qui, elle, peinait à atteindre les 400 000 euros. La preuve que la mort d’un jeune homme suscite moins de compassion que la peur du désordre ?

La démonstration est mortelle.

La tirelire « ne contribue pas à l’apaisement », a osé Elisabeth Borne. La Première ministre s’est gardée de toute pression pour la faire fermer, au prétexte que Messiha l’a hébergée sur une plateforme californienne, la française Leetchi lui ayant réclamé des documents, qu’il n’a pas fournis, prouvant que l’argent irait bien à l’épouse de policier…

L’exécutif laisse donc la provoc se poursuivre pour l’instant. La justice se prononcera ou pas sur sa légalité. Il lui reviendra peut-être de dire si les contributeurs à une cagnotte peuvent implicitement se muer en jurés populaires qui votent pour l’innocence ou la culpabilité d’un policier tueur d’adolescent. En attendant, l’extrême droite a réussi son coup, des policiers flinguent, des jeunes tombent, elle ramasse la mise.