Le patriarcat contre-attaque #MeToo

A-t-on pu considérer que le mouvement #MeToo allait trop loin pour une partie de la population  et pas que des puritains ou religieux ? Pour un ensemble de personnes, femmes comme hommes, émirent des doutes au nom que trop de féminisme, devient vraiment trop.

Réflexions

On pensait que #MeToo avait changé la donne. C’est le contraire qui semble se produire : remise en cause de l’accès à l’IVG, paroles déconsidérées, violences sur les réseaux sociaux… Partout les droits des femmes reculent. Une offensive conservatrice plus qu’inquiétante.

Tous pays confondus, la séquence internationale 2022-2023 a été marquée par une spectaculaire série d’entraves à l’émancipation des femmes. À l’ONU, le secrétaire général António Guterres s’en est vivement inquiété, dès l’ouverture, le 6 mars dernier, de la session annuelle de la Commission de la condition de la femme : « Les progrès réalisés au fil des décennies s’évanouissent sous nos yeux. L’égalité des genres est un horizon de plus en plus lointain. ONU Femmes estime qu’au rythme actuel il faudra attendre trois cents ans avant de l’atteindre. […] Le patriarcat contre-attaque. Mais nous ripostons. »

Combative, cette déclaration émanant d’une instance de paix fait froid dans le dos, dans le sillage encore brûlant de la bataille #MeToo, menée depuis 2017. En une vertigineuse accélération de l’histoire, le mouvement semblait avoir réussi à transformer nos sociétés et nos représentations, grâce à la libération massive de la parole et de l’écoute.

Cinq années seulement auront suffi à traîner le mouvement dans la boue.

Sur les réseaux sociaux, où il avait pourtant éclos, une levée de boucliers est allée jusqu’à ridiculement renommer #MeToo en #MePoo (to poo, « faire caca ») pour mieux y humilier l’actrice Amber Heard. Laquelle, tout un symbole, a perdu en juin 2022 le procès en diffamation que lui avait intenté son ex-mari Johnny Depp, qu’elle accusait de violences conjugales.

En France aussi, les réactions n’auront pas tardé. Emblématique, le cas Polanski : alors que le cinéaste, accusé de viols multiples, renonçait en 2017, sous la pression féministe, à présider la cérémonie des César, il reçut, en 2020, le César du meilleur réalisateur pour J’accuse, pied de nez typiquement masculiniste le faisant, lui, passer pour une victime, à travers la réhabilitation du capitaine Dreyfus racontée par le film…Un pas en avant, deux pas en arrière ?

Il reste impensable pour nombre d’hommes de partager l’espace public, les postes, les étals des librairies, l’argent avec des femmes, et pire encore, féministes.

Dans son nouvel essai, Marie-Cécile Naves, « Calmez-vous, madame, ça va bien se passer ». Réceptions du féminisme, rappelle que, si l’antiféminisme est, pour les autocrates, un ressort traditionnel — « Là où la démocratie recule, là où les droits humains reculent, ceux des femmes régressent en premier » —, la haine des femmes s’est banalisée, d’une rive à l’autre de l’Atlantique : « Il reste impensable pour nombre d’hommes de partager l’espace public, les postes, les étals des librairies, l’argent avec des femmes, et pire encore, féministes. Voyez les derniers livres de Frédéric Beigbeder (Confessions d’un hétérosexuel légèrement dépassé) ou d’Emmanuel Todd (Où en sont-elles ?), et les réactions de tous ces masculinistes qui viennent donner des leçons, puisque, comme l’a très bien vu Virginie Despentes dans son roman Cher connard, “même le féminisme leur appartient” » ! La politiste déclare ainsi ouvert « le backlash du backlash », la riposte aux attaques antiféministes.


Juliette Cerf. Télérama. Source (Très courts extraits)

Nous ne pouvons que vous recommander de vous procurer l’intégralité de cet article.


Des livres sur le sujet :

  1. Backlash. La guerre froide contre les femmes, de Susan Faludi, trad. par Lise Éliane Pomier, Évelyne Chatelain et Thérèse Reveillé, éd. des Femmes-Antoinette Fouque, 752 p., 8,25 €
  2. « Calmez-vous, madame, ça va bien se passer ». Réceptions du féminisme, de Marie-Cécile Naves, éd. Calmann-Lévy, 216 p., 19,50 €.
  3. Droits des femmes : le grand recul ?, d’Amandine Clavaud, éd. de L’Aube, 86 p., 8,90 €.

3 réflexions sur “Le patriarcat contre-attaque #MeToo

  1. christinenovalarue 15/05/2023 / 8h55

    Ce qui excessif est dérisoire. Hélas, me too va trop loin et lasse les plus convaincus, dont moi

  2. bernarddominik 15/05/2023 / 14h11

    Pour Polansky effectivement la réaction patriarcale est abusive, et son film ne valait pas un césar. Mais pour le reste, metoo à poussé le bouchon un peu loin. Maintenant seules les femmes peuvent aborder un homme. Même demander son chemin à une femme peut être interprété comme de la drague.

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