Âme
Âme éternellement renaissante,
Âme joyeuse et fière et vive
Qui hennis dans le bruit du Rhône et de son venti
Âme des bois pleine d’harmonie
Et des calanques pleines de soleil;
De la patrie âme pieuse
Je t’appelle! incarne-toi dans mes vers provençaux!
Recueil « Calendal » (1867). Frédéric Mistral
Mistral
Chez nous, quand le vent souffle et secoue le Midi,
Il bleuit tant le ciel que c’en est incroyable.
Mais il peut par moments être si redoutable
Qu’on en est effrayés : l’on se sent tout petits
Quand ses coups de boutoir ébranlent la Provence
En pliant les cyprès, les courbant jusqu’au sol ;
Puis il se calme un peu, met un soudain bémol…
Et repars de plus belle en folie et en transes.
Même dans la maison l’on en est étourdi
Tant le bruit est énorme. Il gronde, il gueule, il pleure
En secouant les murs ; se rue à l’intérieur
Dès qu’on entr’ouvre un peu un volet ou un huis.
C’est un dément furieux, et nulle part ailleurs
Il n’est de vent plus fou que ce maudit mistral
Qui ne sait que hurler tout en menant le bal
Car il est le plus fort ; c’est en dévastateur
Qu’il se rue par chez nous quand il fait froid là-haut.
Tout bouge sous sa poigne implacable et glacée,
Plus rien n’est immobile, et les grands pins ployés
Se penchent vers le sol comme des arbrisseaux.
Vette de Fonclare