La pantalonnade des cent jours

Élisabeth Borne n’avait pas grand-chose à dire, et cela s’est vu.

Les grandes orientations de la feuille de route du gouvernement avaient déjà été tracées par l’Élysée et par les recommandations de la Commission européenne.

La ligne rouge des 3 % de déficit public sera respectée, le doigt sur la couture du pantalon. Les salaires resteront bloqués ; le pouvoir d’achat poursuivra la chute libre. Les embauches, pourtant indispensables dans l’éducation nationale et dans les hôpitaux, sont renvoyées aux calendes grecques.

Quant aux retraites, la première ministre n’en a pas pipé mot. C’est pourtant la question centrale, le nerf de la crise politique. Elle aurait dû figurer en tête de l’agenda, alors que les Français continuent d’exiger le retrait d’une loi honnie.

Aucun geste, donc, pour apaiser une colère sociale incandescente. Au contraire. La locataire de Matignon, en service commandé, a osé prétendre que cette feuille de route avait pour ambition de « changer la vie des Français ».

Comment peut-on s’autoriser de tels propos quand la retraite à 64 ans va voler deux années de leur vie à des millions de travailleuses et de travailleurs  ? Cette déconnexion du réel est insupportable.

Comment la main tendue aux « partenaires sociaux » dans le cadre du « nouveau pacte de la vie au travail » pourrait-elle trouver preneur, quand l’exécutif n’a réservé aux syndicats, jusqu’ici, que morgue et mépris ? Non, la page des retraites n’est pas tournée.

Les casserolades qui accompagnent chaque déplacement officiel, avant un 1ᵉʳ mai qui s’annonce inédit, transforment les « cent jours d’apaisement » en pantalonnade. On ne voit pas comment la minorité présidentielle pourra achever la législature.

De l’aveu même ­d’Élisabeth Borne, elle recherche désespérément des majorités du côté de la droite pour tenter de sauver les meubles. Ce choix-là est la pire des options : il aggravera encore la fracture démocratique. La maison brûle et la Macronie souffle sur les braises. 


Cathy Dos Santos. Source


Pour Ilyes Ramdani. Médiapart.

Pas de compteur et pas de révolution. La feuille de route présentée mercredi par la cheffe du gouvernement compile pour l’essentiel des chantiers ministériels déjà lancés : remplacement de Pôle emploi par France Travail, réforme du lycée professionnel, loi sur l’industrie verte, loi sur la justice, plan « fraudes »… La crise politique et sociale engendrée par la réforme des retraites n’a visiblement pas convaincu le gouvernement de changer de cap.

Élisabeth Borne a pourtant tenu à souligner le caractère important de cette feuille de route, qu’elle annonce et prépare depuis un mois à grand renfort de réunions et de rendez-vous. « On veut accélérer la mise en œuvre des engagements du président de la République », a-t-elle expliqué. Chargé de faire les sous-titres, son entourage appuie : « Ce n’est pas “On fait comme avant”. La différence, c’est qu’on assume des priorités. On assume qu’on porte une plus grande énergie, un plus grand effort à certains sujets. »  

L’autre nouveau mantra de l’exécutif est un discours de la méthode qui ne coûte pas cher. Après un an passé à se décrire comme le gouvernement du compromis – jusqu’à un mouvement social historique –, le pouvoir veut maintenant se draper de la vertu du concret.


Source (Extraits)


Une réflexion sur “La pantalonnade des cent jours

  1. Anne-Marie 28/04/2023 / 18h57

    Sont pas déconnectés, ils s’en fichent !

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