L’avis de P. Le Hyaric sur le comportement du gouvernement Macron-Borne
Plus on palabre sur la démocratie sur quelques ondes et dans de beaux salons, plus elle s’effiloche, elle se vide de sa substance dans le pays de « la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ». Quelle semaine ! La Première ministre désœuvrée, en attendant la sentence du prince, reçoit l’intersyndicale pour lui confirmer qu’elle est bornée. Pas une virgule ne doit être modifiée à sa directive qui recule l’âge ouvrant droit à la retraite à 64 ans.
Directive, oui. Parce que ce que le pouvoir baptise du nom de loi n’a jamais été voté par l’Assemblée nationale élue au suffrage direct. L’intersyndicale est restée polie et courtoise face au mur de Matignon. Le mouvement social et populaire lui a répondu vertement dès le lendemain.
Le gouvernement tente d’occuper l’espace, de gagner du temps dans l’attente du 14 avril, jour où le Conseil constitutionnel doit rendre son avis. De nombreux juristes et constitutionnalistes ont donné les mille raisons d’une possible censure : Véhicule législatif inapproprié, contrainte des assemblées, étude d’impact cachée, insincérité des informations données par le gouvernement sur les effets de la loi, multiples mensonges. Si ces inconstitutionnalités n’étaient pas estimées comme la demande de lancer un processus de référendum d’initiative partage, la colère face au déni démocratique ne ferait que redoubler de force. Le pouvoir ne peut croire un instant que le mouvement social s’éteindrait après le 15 avril.
Depuis Pékin, le monarque se comportant plus en enfant capricieux qu’en chef d’État a expliqué qu’il ne devait pas être contesté, car il était arrivé en tête des élections présidentielles et élu au second tour. Ce n’est bientôt plus qu’un autocrate qui tord les réalités selon ses vœux. Il sait pourtant qu’il n’a obtenu que les voix de 18% des électeurs inscrits au premier tour et qu’au second, il n’a bénéficié que d’un vote « négatif », c’est-à-dire pour empêcher le pire, celui-là même qu’il nourrit aujourd’hui par son mépris du peuple et des forces sociales. Nier la crise démocratique qui mine le pays est irresponsable et dangereux. N’a-t-il pas entendu le lourd silence des urnes ? Et aujourd’hui même, il amplifie la crise démocratique et en opposant à un mur à l’immense majorité de la population, il ouvre les vannes de l’aventure. Empêcher le pire nécessite une grande activité politique et idéologique montrant qu’une alternative sociale, démocratique et écologique est possible. Celle-ci doit être mise en débat avec les citoyennes et les citoyens qui doivent pouvoir se rendre maîtres d’un nouveau projet de transformation sociale tournant le dos aux politiques ultra-libérales européennes et gouvernementales
Dans le même temps, le ministre de l’Intérieur, qui est tout sauf un ami du peuple, traite les mouvements sociaux de « terrorisme d’ultragauche ». Il s’est même déchaîné devant les commissions parlementaires jusqu’à envisager de retirer des aides publiques à la Ligue des droits de l’Homme. On n’en croit pas ses oreilles.
Toute organisation qui déplait au sinistre ministre, toute organisation qui tente de faire la clarté sur la manière dont sont maltraités et violentés des manifestants devrait être asphyxiée.
Rappelons que la seule période où la Ligue des droits de l’Homme a été menacée, c’était sous le gouvernement… De Pétain. Il paraît que ces ministres défendent, ce qu’ils appellent… « l’État de droit ». Peut-être diront-ils un jour qu’il faut dissoudre le conseil de l’Europe et la Commission des droits humains des Nations Unies qui ont osé critiquer la politique du petit M. Darmanin. Celui-là même qui semble ne rien pouvoir faire contre les réseaux de trafiquants de drogues qui tuent et s’entretuent à Marseille. Rien non plus contre ces réseaux d’extrême droite qui menacent des journalistes, des musulmans et les élus locaux qui souhaitent accueillir des réfugiés. Pour ceux-là, il n’a pas un mot, pas une action, tout occupé à lorgner sur le poste de Premier ministre et à son envie de candidature à la prochaine présidentielle où il compte combler le vide laissé par le parti « Les Républicains » avec des fractions de l’extrême droite.
Darmanin sert à faire avaler une contre-réforme antisociale et anti-démocratique en faisant accréditer l’idée que celles et ceux qui la contestent comme celles et ceux qui contestent la folie des méga-bassines occasionnent du désordre.
Cela lui permet de réactiver le parti de l’ordre. Quel ordre ? Celui de l’injustice, celui du recul social, celui qui nie l’urgence de cesser l’industrialisation de l’agriculture qui fait souffrir les paysans et pose de nouvelles questions pour la santé et la biodiversité.
C’est dans l’arbitraire du pouvoir qui utilise la police contre les citoyens, contre la souveraineté populaire qu’il faut rechercher l’origine du « désordre », au service du maintien du système. Celui qui exploite le travail et la nature au point de mettre en danger la vie humaine et l’humanité. La méthode des méga-bassines pour retenir l’eau est désastreuse pour l’avenir. Le pouvoir utilise une étude du BRGM pour justifier sa décision. Or, ce dernier demande à ne pas utiliser ces données, car elles peuvent être considérées comme dépassées aujourd’hui. Ajoutons que le BRGM est un bureau spécialisé sur les ressources minières et non sur l’eau. C’est la même démarche irresponsable et autoritaire qui a conduit le ministre de l’Agriculture à demander à l’agence spécialisée sur les enjeux de sécurité alimentaire de reconsidérer l’interdiction d’une molécule de fongicide baptisée chlorothalonil. Ce fongicide est interdit en Europe depuis 2019 parce qu’il est considéré comme cancérogène. Il pollue aujourd’hui 34% de l’eau dite potable distribuée en France. Car cela ne tient pour défendre le complexe agrochimique, le ministre demande à continuer d’utiliser ce poison. Le service au capitalisme devient incompatible avec la démocratie et l’écoute des recommandations des scientifiques comme si aucune leçon n’est retenue de la violente pandémie que le monde a dû affronter.
À ce triste tableau, il faut ajouter le dangereux rôle joué par certaines chaînes de télévision qui donnent dans la manipulation la plus grotesque et les sorties de ce petit propagandiste, sieur Hanouna, invitant même de faux policiers déguisés dans une émission.
Les attaques contre les libertés et la démocratie sont aussi à rechercher de ce côté. À force de laisser faire la « main invisible du marché », quelques personnes détiennent la totalité des médias et les mettent au pas.
On licencie un rédacteur en chef aux Échos, on change les directions de Paris-Match et du Journal du Dimanche, on s’approprie en plus des journaux et des télévisions, le secteur de l’édition, le livre pour enfant, le cinéma, les parcs de loisirs… Plusieurs sociétés de journalistes de différents médias ont dû se plaindre ces derniers jours des consignes qui leur étaient données dans le traitement du mouvement social. En effet, il leur a été demandé de survaloriser les violences au détriment de la responsabilité de la détermination dans un mouvement social et syndical rassemblant majoritairement les citoyens pour mettre à bas une contre-réforme qui leur volerait années de leur vie.
Ce sont maintenant les grands festivals qui sont privatisés avec d’énormes conséquences sur les artistes, la création et l’existence des festivals indépendants. Autrement dit, une violente contre-révolution culturelle soutenant la contre-révolution sociale est à l’œuvre. Personne n’est à l’abri. Absolument personne, parmi les créateurs et les journalistes, personne ne sera épargné par ce rouleau compresseur si, par-delà leurs opinions, tous les démocrates ne l’arrêtent.
Note, il est toujours possible de ne pas apprécier ce genre de discours soit en entier, soit dans les détails. Il est posté pour information et connaissance générale. Chacune-chacun en fera ce qu’il voudra. MC
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