Au cœur de l’actualité.

Oui encore sur le sujet, nous remettons une nouvelle vision, un nouvel avis qui en vaut un autre, mais qui nourrit la réflexion. MC

La vision de l’économiste Paul Rocher, spécialiste de la police et auteur de deux ouvrages sur le sujet, y voit un aveu d’échec du pouvoir face à l’ampleur des mobilisations populaires et inscrit ces pratiques dans l’histoire de répression des mouvements ouvriers par la police française.

  • Quelle est votre lecture des violents affrontements contre le projet de méga-bassine dans les Deux-Sèvres et les forces de l’ordre…

La préfecture parle d’une manifestation de six mille personnes, durant laquelle les forces de l’ordre auraient tiré en quelques heures plus de quatre mille grenades lacrymogènes et de désencerclement – sans compter les grenades assourdissantes et les LBD.

Il y avait évidemment beaucoup plus de manifestants, ce qui révèle la contradiction dans laquelle se trouve la préfecture : elle cherche à minimiser l’ampleur de l’événement tout en voulant montrer la fermeté de l’État.

La violence d’une partie des manifestants ne justifie pas un usage aussi massif, disproportionné et sans distinction des armes non létales, utilisées à moyenne et longue distance. La Ligue des droits de l’homme indique que la gendarmerie a poursuivi ses tirs même lorsque les secouristes soignaient les blessés.

  • Dans les premières semaines du mouvement contre la réforme des retraites, on a peu parlé de violences policières. Jusqu’à la récente explosion de témoignages sur des abus…

Pourtant, dès les premières manifestations, particulièrement calmes, le dispositif déployé s’est inscrit dans la tendance forte de ces dernières années : une brutalisation du maintien de l’ordre. […]

  • Il semble désormais difficile de manifester, même pacifiquement, sans être confronté aux gaz lacrymogènes, aux nasses ou aux barrages filtrants.

D’abord, un soupçon généralisé pèse sur les manifestants. Un des points clés de compréhension de l’institution policière est qu’elle se voit comme une citadelle assiégée. Cette méfiance qui la pousse à l’hostilité est à la fois interne à la police et liée à la criminalisation gouvernementale d’une partie du militantisme politique. C’est aussi un aveu d’échec face à l’importance des mobilisations. Ces pratiques autoritaires mettent en cause le droit fondamental de la libre expression et ont un rôle dissuasif pour ceux qui souhaitent rejoindre les manifestations. […]

  • Une unité décriée fait les gros titres : la Brigade de répression des actions violentes motorisée (BRAV-M), …

Cette unité fait sans conteste preuve d’une agressivité supérieure aux autres, d’autant plus qu’elle renvoie à une esthétique viriliste et intimidante : les grosses motos, le bruit, les matraques… Son potentiel de violence est augmenté par sa mobilité : le ciblage est moins précis et la douleur d’un coup donné avec de la vitesse est démultipliée. […]

[…]

  • Les journalistes arrêtés ou brutalisés en manifestation sont-ils des victimes collatérales ou des cibles délibérées pour les forces de l’ordre ?

Bien qu’ils soient souvent identifiables, ces journalistes font quand même état de dégradations de leur matériel et d’entraves à leur travail. Il y a une volonté de réduire la capacité de la presse à rendre compte des violences policières, non seulement du côté de la police mais aussi du pouvoir politique […]

[…]


Propos recueillis par Romain Jeanticou. Télérama. Source (Extraits)


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