Morale ou pas…

… c’est une autre histoire !

En Belgique, on peut choisir de mourir pour des troubles psy « incurables »

Alors que la convention citoyenne sur la fin de vie s’achève en France, enquête sur une particularité belge : la possibilité de se faire euthanasier pour des souffrances psychiques, même lorsqu’on est jeune et en bonne santé.

Olympe a 23 ans et veut mourir. Mais, pas immédiatement : elle réalise d’abord un tour d’Asie du sud-est. La jeune youtubeuse avait lancé l’info fin janvier sur les réseaux sociaux, annonçant mine de rien, entre les couchers de soleil et les cocotiers, son intention de recourir à l’euthanasie en Belgique d’ici à la fin 2023. Elle souffre de troubles psychiatriques et se dit épuisée par de nombreux traumatismes… ce qui ne l’a pas empêchée de se reconvertir en influenceuse voyage.

Les partisans du « droit à mourir » se seraient bien passés de la mauvaise pub.


En France, alors que la convention citoyenne sur la fin de vie touche à sa fin, l’histoire d’Olympe rappelle cette possibilité belge : se faire euthanasier pour troubles psychiques, y compris des individus jeunes et en bonne santé. Certes, ce sont des cas relativement rares : 26 personnes en 2022, soit 0,8% du nombre total d’euthanasies. Mais ils témoignent d’une conception schizophrénique de la mort propre à la Belgique, qui peut mettre très mal à l’aise côté français.

[…]

Prouver l’incurabilité

C’est la condition du « trajet d’euthanasie », comme on l’appelle en Belgique : trois médecins doivent reconnaitre au candidat une situation incurable de souffrance psychique qui ne peut être apaisée.

Problème : dans le monde flou et mouvant de la psychiatrie, il est pratiquement impossible de considérer qu’un patient est irrémédiablement condamné. […]

  • Premièrement, parce que les maladies psychiques ne laissent aucune lésion ou dégénérescence dans le cerveau qu’il ne soit impossible, cliniquement, de soigner.
  • Ensuite, parce que de nombreux patients se sentent foutus – le désespoir étant l’essence même de la dépression : la cause se mêle à l’effet.

[…]

Renoncement

Finalement, ce que la loi belge ne dit pas, c’est que derrière le terme d’incurabilité, on parle surtout de renoncements : des patients trop fatigués pour continuer à se battre. C’est le cas de Romain, qui parle de son sentiment d’être « un cobaye », et ne veut plus tenter un nouveau traitement. Et puis, il y a Wout Van Steenwinkel. Il est le fils d’une quinquagénaire qui a obtenu l’euthanasie après un viol qui l’aurait irrémédiablement détruite, il y a dix ans. Il raconte sa famille brisée : « Certaines souffrances soudent les individus, celle-ci nous a éloignés ».

Le jeune homme a d’abord cru que le pire était passé ; le viol n’était en fait que le début. « Quand ma mère est sortie de sa première hospitalisation, on a cru que tout allait aller mieux, explique-t-il. Mais elle y est retournée, et l’histoire s’est répétée, encore et encore, pendant des années. Peut-être qu’un jour un nouveau traitement va marcher, mais ce n’est pas sûr à 100%. Or, elle ne peut plus supporter cette douleur. »

Et Van Veen de résumer : « Le soignant n’essaie plus de prédire si la souffrance va un jour diminuer, mais si le patient s’est suffisamment battu pour guérir et s’il est temps de respecter son désir de mourir ». 

On considère souvent les euthanasies comme le fruit d’un choix individuel ; elles ne sont pourtant pas sans implication pour la société. D’un point de vue purement médical, elles questionnent le rapport médecin-malade.

Quelle est la légitimité d’un psychiatre qui reconnaît son incapacité à aider son patient ?

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Tabou autour de la question

[…] Au fond, la question de l’euthanasie est toujours celle de l’individualisme, qui refuse de voir le choix personnel comme une action déterminante qui fait de la société un tout. Et c’est comme ça qu’on se retrouve avec des Olympe qui brandissent avec air de défi l’imparable argument : « C’est mon choix ».

Wout Van Steenwinkel, qui reconnaît avoir pleuré toutes les larmes de son corps en apprenant que la demande d’euthanasie de sa mère avait été acceptée. Mais se refuse à protester : « Je ne peux pas imaginer ce qu’elle traverse, donc je supporte sa décision. Ce n’est pas à moi de décider », répète-t-il. 

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Coline Renault. Charlie hebdo Web. Source (extraits)


Une réflexion sur “Morale ou pas…

  1. bernarddominik 08/03/2023 / 12:31

    Oui c’est la grande question morale ou pas. Le problème c’est que la mort est irréversible, impossible de changer d’avis après. Donc je trouve inquiétant qu’on puisse demander un suicide assisté pour des troubles psychiques, qui peuvent être temporaires, quoi qu’en dise la demanderesse.

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