Ambiance sénatoriale…

… tranquillousse l’examen du projet sur le retraite…

L’ambiance est bonne, on ne me parle pas tant que ça des retraites, a lancé Macron parmi les bottes de paille d’un stand bovin du Salon de l’agriculture.

L’ambiance était surtout bonifiée par un service d’ordre musclé et important, qui veillait à écarter les contestataires importuns.

Mais l’intéressé sait bien évidemment que, « pas tant que ça » ou pas, les retraites et, surtout, la façon dont il compte les réformer sont un sujet dont il n’a pas fini d’entendre parler. Au Sénat, d’abord, où le dossier vient d’arriver en lecture et en examen, puis dans la rue, avec le pays « à l’arrêt » mardi prochain.

Certes, pour ce qui est du Sénat, la chambre haute a la réputation de parler bas. Non seulement les sénateurs qui se sont saisis du texte mardi en commission répètent qu’ils n’entendent pas hausser le ton, mais ils tiennent à se distinguer des échanges tumultueux et cacophoniques de l’Assemblée. Et seront, comme le dit Raffarin, qui fut un des leurs avant de se reconvertir en Lao Tseu du Haut-Poitou, « exigeants mais constructifs ». En d’autres termes, pas de risque d’obstruction. Et, moyennant des amendements en faveur des mères de famille et de l’emploi des seniors, les Républicains, majoritaires au Sénat, voteront, sauf accident, le 12 mars le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans. Et vraisemblablement une bonne partie des autres articles importants de la réforme dans la foulée. Le tout sans trop de bruit et, en tout cas, sans fracas.

Peu à craindre, donc, pour Macron de ce côté. En dépit de ses rapports pas toujours simples avec le président du Sénat, Gérard Larcher, il peut compter, au Palais du Luxembourg, sur avec le président du Sénat, Gérard Larcher, il peut compter, au Palais du Luxembourg, sur des alliés de circonstance LR plus fiables que ceux de l’Assemblée. Lesquels, au passage, n’ont pas fini de s’écharper.

L’énervé Pradié vient ainsi de lancer que « les sénateurs ne sont pas les représentants du peuple », ce qui va, à n’en pas douter, fluidifier les relations au sein de son parti et entre les deux groupes parlementaires.

Mais que la droite majoritaire au Sénat sauve à la fois le débat et l’examen de la réforme de Macron ne réglera pas le problème instantanément. De la commission mixte paritaire qui suivra au retour à l’Assemblée, le parcours parlementaire du projet de loi éruptif n’est pas terminé et peut encore faire du bruit. D’autant que, avant même la fin de l’examen et le vote par le Sénat, la rue aussi va donner son avis.

Un avis, on le sait, très négatif, qui, à en croire l’ensemble des sondages sur le sujet, persiste à être partagé par deux tiers des interrogés. Dont bon nombre ont déjà fait part de leur intention de se faire entendre haut et fort dans les rues du pays le 7 mars, avec, pour certains, des grèves reconductibles à l’appui.

S’y retrouveront aussi les syndicats, toujours réunis contre la réforme, mais aussi la Nupes et LFI, qui ne cache pas son intention, en dépit de l’agacement de plus d’un de ses partenaires, de continuer à « tout bloquer » dans la fureur et dans le bruit.

On ignore si « l’ambiance » sera aussi « bonne » qu’au Salon de l’agriculture. Mais, cette fois, même en refusant d’écouter, Macron garde forcément en tête qu’il risque d’entendre parler plus que « tant que ça des retraites ».


Erik Emptaz – éditorial : Le Canard Enchaîné. 01/03/2023


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