Démentiels et révoltants.

Rouge de colère… Comment la population peut-elle rester sans réaction ?

[…] Tandis que la France dénombre 12 millions de précaires énergétiques et que de nombreux ménages et commerces voient leurs factures d’énergies exploser, TotalEnergies ne s’est jamais aussi bien porté […]

Économiste à l’Observatoire des multinationales et spécialiste des questions climatiques, Maxime Combes explique à Mediapart pourquoi, malgré un monde qui brûle, TotalEnergies parvient à réaliser encore des superprofits, mais aussi à investir massivement dans de nouveaux projets fossiles, malgré ses tentatives de greenwashing.

  • Mediapart : TotalEnergies vient d’annoncer un profit de plus de 19 milliards d’euros sur l’année 2022, est-ce un record par rapport à l’année précédente ?

Maxime Combes ☹…]Après avoir réalisé 14,2 milliards d’euros de profits en 2021 (40 % de plus qu’en 2019), voilà que […] Mercredi 8 février 2023, la compagnie pétrogazière française TotalEnergies a annoncé un bénéfice net de 19,1 milliards d’euros pour l’année 2022. Un chiffre en hausse de 28 % par rapport à 2021. Au moment où l’inflation rogne les revenus, aggravant la pauvreté et la précarité.

Précisons que ces profits atteindraient le montant stratosphérique d’environ 35 milliards d’euros sans les provisions sur ses actifs russes inscrites dans les comptes du groupe, permettant à son PDG Patrick Pouyanné d’affirmer que la Russie occasionne des pertes colossales au groupe, bien que ces pertes ne soient que théoriques à ce stade.

Le groupe a ainsi encaissé début octobre 2022 près de 430 millions d’euros de dividendes pour sa participation dans le groupe russe Novatek – avant d’annoncer vouloir s’en retirer.

Pour que vos lecteurs et lectrices se fassent une idée, 19 milliards de profits c’est l’équivalent de la rémunération annuelle de 380 000 personnels d’hôpitaux, la rénovation globale de 310 000 passoires énergétiques, ou encore une prime de 6 300 euros pour chacun des 3 millions d’étudiants.`

  • Pourquoi ces profits sont-ils si énormes ?

Il faut d’abord dire que ces profits sont des superprofits parce ce que ce sont des profits d’aubaine amassés sans qu’ils résultent d’investissements nouveaux ou des risques pris par TotalEnergies, ni même d’une amélioration du processus de production ou d’un accroissement significatif du volume produit.

Comme tous les groupes pétrogaziers, TotalEnergies profite de l’inflation dans le secteur de l’énergie, d’abord entretenue par la reprise économique mondiale d’après-pandémie et les pénuries sur les chaînes d’approvisionnement, et désormais surtout alimentée par la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine.

Tant que ce sera jackpot pour le capitalisme fossile, la lutte pour le climat sera mise en échec.

Les multinationales du pétrole et du gaz qui maîtrisent toute la chaîne de valeur, de la production de pétrole et de gaz jusqu’à la commercialisation, comme c’est le cas de TotalEnergies, touchent le pactole à toutes les étapes. Les recettes tirées des activités de production explosent puisque leurs coûts sont relativement stables à court terme. Les résultats des activités de négoce international et d’acheminement sont aussi en forte croissance. Enfin, généralement jugée peu rentable, l’activité de raffinage dégage désormais des marges plus généreuses.

Les gains qu’engrange TotalEnergies progressent à toutes les étapes du processus de production. TotalEnergies est donc un « profiteur de guerre » pour reprendre le terme utilisé par Emmanuel Macron au G7 en Allemagne en juin 2022.

[…]

  • Où vont aller ces profits ? Dans la poche des actionnaires ?

Pour tenter de désarmer la critique, Patrick Pouyanné, le PDG de TotalEnergies, a passé son année 2022 à affirmer que le groupe utilisait les superprofits réalisés dans les hydrocarbures pour accroître massivement ses investissements dans les énergies renouvelables.

Mais selon les documents de TotalEnergies, le groupe avait investi 3 milliards de dollars dans les énergies renouvelables et l’électricité en 2021, soit à peine 1,6 % de son chiffre d’affaires et presque trois fois moins que ce que le groupe a consacré à la rémunération de ses actionnaires cette année-là.

TotalEnergies va augmenter la rémunération de ses actionnaires d’un montant deux à trois fois plus important que l’augmentation de ses investissements dans les énergies renouvelables.

[…]

  • Les superprofits de TotalEnergies seront-ils taxés par l’État français ?

[…] TotalEnergies n’avait pas payé un seul euro d’impôt sur les sociétés en France sur les exercices 2019 et 2020. Nous attendons les données pour 2021 pour vérifier si TotalEnergies a payé l’impôt des sociétés alors que ses profits mondiaux atteignaient 14,2 milliards d’euros. […]

  • Sans compter que l’entreprise bénéficie d’aides publiques, alors qu’elle a supprimé des emplois…

Bien souvent, Emmanuel Macron et Bruno Le Maire nous disent « Réjouissez-vous des très bons résultats des grands groupes français, car les profits d’aujourd’hui sont les emplois de demain. »

Mais à l’échelle du CAC40, les emplois supprimés en 2020 ont donné des profits conséquents en 2021 et une explosion des dividendes en 2022. TotalEnergies ne déroge pas vraiment à la règle : 2 300 emplois supprimés en 2020 (dont 410 en France) et 4 167 en 2021 (dont 700 en France).

[…]


Mickaël Correia. Mediapart. Source (Court extraits)


Une réflexion sur “Démentiels et révoltants.

  1. bernarddominik 10/02/2023 / 8h18

    Je n’arrive pas à comprendre que Total reçoive des aides de l’état alors qu’il se gave sur le dos des consommateurs. C’est scandaleux

Les commentaires sont fermés.