Les jeunes – Les réseaux sociaux

Perméables aux fake news, les jeunes ?

Pas tant que ça, explique le sociologue Julien Boyadjian, qui décrit surtout une génération clivée, entre milieux sociaux aisés et informés et des catégories populaires plus méfiantes des institutions.


Vous expliquez que la jeunesse connectée n’est pas uniforme […].

[…] Cette génération a beau être née à l’ère du numérique, tous les jeunes ne sont pas forcément à l’aise ou compétents avec les outils, et ils développent des usages du numérique très différents. […]

  • Comment les compétences numériques s’acquièrent-elles ?

[…] Dans les milieux populaires, la connexion se fait surtout avec les téléphones et les tablettes, moins avec les ordinateurs.

Il y a donc une première différence entre ceux qui ont eu accès dès le plus jeune âge à des ordinateurs, et les autres. […]

  • Quelles sont les inégalités d’usage ?

Elles portent d’abord sur les compétences numériques.

Par exemple, j’ai constaté dans les écoles deuxième chance (un dispositif pour les décrocheurs scolaires souhaitant se réinsérer dans le marché de l’emploi) que les jeunes, qu’on pensait agiles avec le numérique, avaient besoin d’apprendre à créer une adresse mail, gérer les fichiers, faire des dossiers, mettre des pièces jointes… Des choses qui peuvent sembler ultra basiques mais qui ne le sont pas forcément.

Ensuite, il y a les jeunes ayant un rapport au web de divertissement exclusivement : ils consomment essentiellement de la vidéo, des photos et assez peu de texte, sur Instagram et TikTok. […]

  • Selon vous, il est assez rare que les jeunes s’informent exclusivement via les réseaux sociaux.

Si on regarde les grandes catégories, effectivement le numérique est aujourd’hui la première modalité citée par les jeunes pour s’informer [mais ils] sont en réalité peu nombreux. […]

  • Vous citez notamment Quotidien, de Yann Barthès, sur TMC…

[…] … les réseaux sociaux sont souvent complétés par la télévision. En revanche, la radio est assez peu écoutée, voire très peu, et la presse écrite papier quasiment pas lue.

[…]

  • Quel rapport ont-ils à l’actualité ?

L’intérêt pour l’actualité varie selon l’origine sociale des jeunes et leur contexte d’études. […] Les enquêtes, pour schématiser, ont toujours montré que dans les milieux sociaux aisés, il y avait une appétence plus forte pour l’actualité dite noble, politique, internationale et économique alors que dans les milieux populaires il y avait un attrait plus vif pour le sport et les faits divers. Aujourd’hui, cet intérêt est beaucoup plus large : il s’agit davantage d’un intérêt pour « ce qui fait le buzz » sur les réseaux sociaux. […]

[…]

  • Quelle est leur perméabilité aux fake news ?

Dans les rares études sur les fake news, aux États-Unis notamment, les retraités de plus de 65 ans sont les plus forts propagateurs de désinformation, souvent à des fins militantes. Sur les comptes des jeunes, je n’ai pas observé d’échanges de fake news. Elles peuvent circuler dans des espaces plus fermés, comme WhatsApp ou Telegram : on ne peut pas exclure cette hypothèse.

[…]


Julia Vergely. Télérama. Source (Courts extraits)