Retraites : dans le secret de la concession

Un conseiller de l’Élysée le reconnaît désormais : « On a perdu la bataille de l’opinion. La pédagogie sur la nécessité de la réforme ne passe pas : les Français ne croient plus le gouvernement. »

Attention, cet article a été écrit avant l’intervention d’Élisabeth Borne sur TF1 le 02/02/2023.

Cet aveu de semi-échec n’entrave cependant en rien la volonté d’Emmanuel Macron de faire voter la réforme des retraites. « Il ne s’agit plus de convaincre, mais de faire voter », tranche l’homme du Château.

Pour faire voter la réforme, il faut tout de même con vaincre une majorité de députés (sauf à recourir au 49.3).

Aussi une nouvelle réunion a-t-elle eu lieu dimanche soir à Matignon, en présence des ministres concernés et des responsables de la majorité parlementaire.

Tout ce petit monde a dressé la liste des concessions qu’il était encore possible de faire au cours du débat à l’Assemblée, afin de séduire les députés LR récalcitrants et tenter, sinon de désamorcer, du moins d’atténuer la grogne envers la réforme.

  • Première concession, suggérée par François Bayrou et qui fait à peu près l’unanimité : une « clause de revoyure » de la réforme en 2027.
  • Deuxième concession, réclamée par LR, notamment Aurélien Pradié, qui en a fait son cheval de bataille : les carrières longues. Les salariés qui ont commencé à travailler avant 21 ans pourront partir à la retraite dès 63 ans, une fois qu’ils auront le nombre de trimestres nécessaire. Une mesure à 2 milliards d’euros, approuvée d’autant plus facilement par Elisabeth Borne qu’elle constituait aussi un gros point de friction avec l’aile gauche de la majorité.
  • Troisième concession : permettre aux femmes de valider leurs trimestres de maternité en trimestres cotisés – et non plus comme une simple durée de travail. Encore une idée du MoDem, qui devrait présenter un amendement en ce sens.

Concrètement, le gouvernement va prendre l’engagement solennel d’harmoniser vers le haut les règles entre le public et le privé. Le nombre de trimestres auxquels donne droit chaque enfant est aujourd’hui de huit dans le privé et de quatre dans le public. Inversement, les pensions de réversion sont soumises dans le privé à conditions de ressources, alors qu’elles ne le sont pas dans le public.

La Première ministre veut à tout prix effacer le sentiment que les femmes seraient pénalisées par la réforme. L’idée selon laquelle celle-ci aurait pour effet de faire travailler les femmes plus longtemps que les hommes est à sesyeux une « fake news ». Une « fake news » propagée par quelques-uns de ses propres ministres, tel Franck Riester !

Tous les futurs amendements ont, bien évidemment, été validés par Macron, lequel continue à suivre le dossier jusque dans les moindres détails.

« Tout transite par lui , ironise le président des sénateurs centristes, Hervé Marseille. Il passe même l’aspirateur ! »

En attendant, c’est sa réforme qui casse la vaisselle !


Article lu dans le Canard enchaîné. 01/02/2023


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