Grâce à Macron ?

Des usines d’armement au Qatar…

L’émir Al-Thani, excellent client des industriels français, militaires et civils, entend pouvoir répondre, à moyen terme, aux besoins de ses armées, de ne plus dépendre des traditionnels fournisseurs américains ou autres. Une demande pour laquelle le commercial président, Emmanuel Macron, ne peut laisser sans réponses… peut-être ce qui l’a incité, officieusement du moins, à se rendre au Qatar lors de la coupe du monde de Foot (événement dont il se moque… sauf si bien sûr l’équipe de France est une nouvelle fois victorieuse)… Notoriété n’est pas oubliée non plus !

Tamim al-Thani ne manque pas d’arguments convaincants ; le Qatar est, en effet, riche à milliards. Mais, comme il lui faudra former une main-d’œuvre qualifiée et construire des usines, il a besoin de la coopération et de l’aide technologique de la France. Commentaire méfiant d’un expert militaire : quand on entreprend de fabriquer des armes, on envisage aussi d’en vendre à qui en voudra, au risque de porter préjudice, plus tard, aux industriels français.

Groupes djihadistes alimentés en dollars

La démarche de l’émir demeurant confidentielle, « Le Canard » a demandé sa réaction à un diplomate. Lequel, tout de même surpris, n’a eu pour toute réponse que cette formule désabusée : « Ce n’est jamais qu’un nouvel épisode des amours franco-qatariennes. » Et le passé lui donne raison.

Voilà plus de vingt ans, deux accords de défense ont été signés avec le Qatar (en 1994 et en 1998) par lesquels la France s’engage à voler à son secours en cas de menace extérieure. Ces aimables dispositions de deux présidents français n’ont pas toujours été payées de retour. L’émirat, qui entretient de bonnes relations avec les Frères musulmans, a en effet financé des groupes djiha­distes, y compris au Sahel, sans que Hollande ou Macron ne piquent la moindre colère.

Une remarque en passant : depuis 2012, « Le Canard » a publié une dizaine d’articles sur ces financements, sans recevoir un démenti des dirigeants du Qatar et sans que l’Élysée ne réagisse publiquement.

Seul comptait le commerce. En 2015, François Hollande avait quitté son bureau présidentiel pour aller signer à Doha, la capitale du Qatar, une première vente de Rafale. Deux ans plus tard, Emmanuel Macron accomplissait le même voyage pour d’autres contrats totalisant 11 milliards d’euros.

Autre preuve des excellents rapports entre les deux États : sous ces deux présidents, l’émirat a augmenté ses investissements dans plusieurs entreprises stratégiques françaises. Ce sera à la Direction générale de l’armement (DGA), la puissante administration du ministère des Armées, de répondre à la demande qatarienne dès que l’Élysée aura donné son feu vert. Rien de ce qui concerne l’industrie de défense n’échappe à la DGA et à ses 10 000 salariés, ingénieurs et techniciens de l’armement, parmi lesquels de nombreux polytechniciens. Et l’émir Al-Thani a demandé à Macron de pouvoir bénéficier de l’« expertise » de cette quasi-institution.

Quant à la suite, « Le Canard » sait déjà qu’il s’agira pour la DGA de créer au Qatar une « base industrielle des technologies de défense ». Avec mission de fournir les conseils et la coopération nécessaires à la future industrie de défense de l’émirat. Laquelle devrait, selon la volonté de l’émir, satisfaire les besoins de son armée de terre (équipée petitement de blindés et de transports de troupes français), ainsi qu’aux besoins de son armée de l’air (solidement fournie en « Mirage 2000 » et en « Rafale »).

À charge, sans doute, pour la DGA de veiller à ce que cette industrie de défense ne devienne pas plus tard un concurrent pour les vendeurs d’armes françaises.


Claude Angeli. Le Canard enchaîné. 30/11/2022


Une réflexion sur “Grâce à Macron ?

  1. bernarddominik 05/12/2022 / 15h08

    Si Macron signe c’est qu’il est un traître. Car effectivement au Qatar les charges sociales sont nulles et les employés immigrés payés une misère. C’est donc à prix très bas que le Qatar pourra vendre nos armes. Mais en plus c’est ridicule: la Qatar est si petit que les usines de son territoire seront une cible de choix pour ses éventuels adversaires.

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