La Sécu va gérer les cotisations des 44 millions d’adhérents de l’Agirc-Arcco. Merci le 49.3 !
Un article du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) (supprimé par les députés mais rétabli, le 20 octobre, par le gouvernement et finalement adopté dans le cadre du 49.3) réveille craintes et fantasmes autour du magot de l’Agirc-Arrco.
Cette caisse de retraite complémentaire du secteur privé possède 70 milliards de réserves, dont elle craint de se faire dépouiller par le régime général, en déficit quasi chronique.
L’article du budget de la Sécu en question prévoyait qu’à compter du 1″ janvier 2023 l’Urssaf, organisme collecteur de la Sécurité sociale, gérerait les quelque 85 milliards de cotisations que versent chaque année à l’Agirc-Arrco ses 44 millions d’adhérents. Finalement, l’échéance a été repoussée au 1er janvier 2024.
Cet amendement est une mesure technique pour « simplifier les démarches des entreprises », est-il expliqué dans l’exposé des motifs de la loi. Il s’agit d’éviter aux entreprises qui font déjà une déclaration pour la Cnav (régime général de retraite) d’en faire une seconde pour la complémentaire. « Fausse évidence », tranchent le Medef et les syndicats de salariés, qui gèrent (paritairement)l’Agirc-Arrco.
Caisse pas très claire
« La Cnav ne fait pas le même travail que nous, expliquent-ils. Elle ne calcule qu’une fois les droits des salariés : quand ils prennent leur retraite. Et ce indépendamment du montant des cotisations qu’ils ont versées. Ça prend généralement entre six mois et un an. Nous, nous vérifions au jour le jour que chaque cotisant a bien reçu le nombre de points correspondant à sa cotisation. » Un travail qui, selon un ancien directeur de l’Agirc-Arrco, permet de rectifier les comptes « de 1 à 2 milliards par an ». Et d’interroger : « Pourquoi nous enlever ce que nous savons faire pour le confier à la Cnav, qui ne sait pas le faire ? »
Certains ont leur petite idée. Telle cette délégation de la caisse de retraite complémentaire qui a rencontré cet été le député (centriste) Charles de Courson. « Ils ont tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences de cette réforme », assure le parlementaire, qui a déposé illico un amendement (voté par la droite et la Nupes) pour supprimer l’article contesté.
Car, au-delà des bourdes et des retards prévisibles, ils craignent que cette réforme ne soit la première étape vers la mainmise sur le trésor de la caisse de retraite. « Si la Cnav encaisse et gère les cotisations, expliqué un haut fonctionnaire spécialiste des retraites, on peut craindre qu’elle en « emprunte » une partie pour couvrir un déficit gênant. A l’image de ce qu’elle a fait en 2020 : elle s’est attribué 5 milliards gérés par le Fonds de réserve pour les retraites qu’elle n’aurait dû toucher qu’au cours des cinq années à venir. »
Ces gens méfiants rappellent que « la réforme des retraites votée en 2020 prévoyait la disparition des régimes complémentaires et l’intégration de leurs réserves dans la caisse universelle », censée gérer le système unique de retraites voulu par Macron.
La réforme a été abandonnée, mais une bonne idée ne meurt jamais tout à fait.
Hervé Martin. Le Canard Enchainé. 26/10/2022
Portons tous plainte contre Macron pour vol.