Deux jours 5

Sète, Espace Georges Brassens

Est-ce que Georges Brassens aurait « apprécié » ce genre d’espace, pas certain !

A titre personnel cela ressemble plus à un rattrapage plus ou moins politique et/ou municipal, voire commercial, permettant d’utiliser le bonhomme décédé pour valoriser la ville.

Citons Wikipédia : construit à l’initiative du maire et député Yves Marchand, l’espace Georges-Brassens a été totalement revu par son architecte Christian Salvador en 2006 et sa surface doublée sous l’impulsion du maire François Commeinhes.

Même pas de photo de l’edifice, par déception.

Reste ses textes…

Le mécréant

Est-il en notre temps rien de plus odieux,
De plus désespérant, que de n’ pas croire en Dieu ?

J’voudrais avoir la foi, la foi d’ mon charbonnier,
Qui est heureux comme un pape et con comme un panier.

Mon voisin du dessus, un certain Blaise Pascal,
M’a gentiment donné ce conseil amical :

« Mettez-vous à genoux, priez et implorez,
Faites semblant de croire, et bientôt vous croirez. »

J’ me mis à débiter, les rotules à terre,
Tous les Ave Maria, tous les Pater Nos ter,

Dans les rues, les cafés, les trains, les autobus,
Tous les de profundis, tous les morpionibus…

Sur ces entrefaites-là, trouvant dans les orties
Une soutane à ma taille, je m’en suis travesti

Et, tonsuré de frais, ma guitare à la main,
Vers la foi salvatrice je me mis en chemin.

J’ tombai sur un boisseau d’ punaises de sacristie.
Me prenant pour un autre, en choeur, elles m’ont dit :

Mon Père, chantez-nous donc quelque refrain sacré,
Quelque sainte chanson dont vous avez l’ secret ! »

Grattant avec ferveur les cordes sous mes doigts,
J’entonnai « le Gorille » avec « Putain de toi ».

Criant à l’imposteur, au traître, au papelard,
Elles veulent me faire subir le supplice d’Abélard,

Je vais grossir les rangs des muets du sérail,
Les belles ne viendront plus se pendre à mon poitrail,

Grâce à ma voix coupée j’aurai la place de choix
Au milieu des Petits chanteurs à la croix d’ bois.

Attirée par le bruit, une dame de Charité,
Leur dit : « Que faites-vous ? Malheureuses, arrêtez !

« Y’a tant d’hommes aujourd’hui qui ont un penchant pervers
À prendre obstinément Cupidon à l’envers,

« Tant d’hommes dépourvus de leurs virils appas,
À ceux qui en ont encore ne les enlevons pas ! »

Ces arguments massue firent une grosse impression,
On me laissa partir avec des ovations.

Mais, sur l’ chemin du ciel, je n’ ferai plus un pas,
La foi viendra d’elle-même ou elle ne viendra pas.

Je n’ai jamais tué, jamais violé non plus,
Y’a déjà quelque temps que je ne vole plus,

Si l’Éternel existe, en fin de compte, il voit
Qu’ je m’ conduis guère plus mal que si j’avais la foi.


Georges Brassens