Nouvelle, X-ième réforme des retraites

Le rapport des experts du Conseil d’orientation révèle des vérités (sur les fonctionnaires, les seniors, les familles nombreuses) pas toutes du goût du Président.

Le projet (politiquement et socialement explosif) de réforme des retraites s’est trouvé une boussole : le rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR).

  • Faut-il, comme l’envisage Macron, reculer l’âge de départ… ou allonger la durée de cotisation via un simple amendement au budget de la Sécurité sociale ?
  • Faut-il faire des économies pour financer, par exemple, la dépendance ?
  • Faut-il rassurer Bruxelles et les marchés quant à notre maîtrise des dépenses publiques ou ménager la rue, les syndicats et même la majorité présidentielle ?

Le calendrier de publication du rapport du COR est à la mesure de ces hésitations.

Destiné, comme chaque année, à paraître au mois de juin, il a été repoussé au 15 septembre, le gouvernement n’ayant pas fourni les données nécessaires en temps utile. A la lecture de certains chapitres (tel celui sur la rémunération des fonctionnaires), on comprend mieux pourquoi.

Cueillis parmi les 346 pages de ce pavé, voici quelques extraits piquants.

  • Aubaine sans lendemain pour les fonctionnaires

Sans rapport direct avec les retraites, le scoop est caché dans le rapport : après avoir bénéficié, au 1er juillet, d’une augmentation de 3,5 % de leur point d’indice, les fonctionnaires vont affronter cinq ans de vaches maigres.

L’information émane de calculs alimentés par la direction du budget de Bercy : selon les experts du COR, la valeur du point enflerait (compte non tenu de l’inflation) de seulement 0,1 % par an entre 2022 et 2027 ! Les salaires privés, eux, augmenteraient de 0,4 %, mais en plus de l’inflation. Résultat : d’ici à 2027, les fonctionnaires verraient leur traitement indiciaire (revenus hors primes) baisser de 10,7 %, alors que le pouvoir d’achat des salariés du privé, lui, gagnerait 2 %.

La valeur du point d’indice n’est pas la seule composante de l’augmentation des traitements des fonctionnaires : s’y ajoutent, en effet, les promotions automatiques. Par ailleurs, des facteurs imprévus (notamment politiques) peuvent mettre le foutoir dans ces belles prévisions technocratiques.

Témoin la récente hausse de l’indice, sortie de son chapeau par Macron en pleine campagne électorale. La précédente augmentation avait été inopinément décidée par Hollande en juillet 2016 (il n’avait alors pas encore renoncé à se représenter) puis renforcée par une opportune rallonge en février 2107, à deux mois du premier tour de la présidentielle. Sauf que (changement de casting oblige) c’est Macron qui en a profité pour sa campagne ! Les fonctionnaires pas trop âgés peuvent se consoler : l’indice devrait de nouveau augmenter plus vite que l’inflation, à compter de… 2027, année de la prochaine élection présidentielle (une pure coïncidence).

  • Pauvres vieux retraités !

Le pouvoir d’achat moyen des retraités (même s’il reste encore à peu près égal à celui des actifs) est en baisse. Depuis 1987, les retraites, en effet, sont indexées sur l’inflation, et non phis sur les salaires. Résultat ? Aucun gain de pouvoir d’achat, et parfois des pertes. Comme en 2016, quand Hollande décide de prendre en compte l’inflation avec un an de retard. Ou quand le relèvement du point de retraite complémentaire Agirc-Arcco se révèle inférieur à l’inflation. Selon les calculs du COR, plus un salarié a pris sa retraite il y a longtemps, plus son pouvoir d’achat a baissé : aujourd’hui, un non-cadre parti à la retraite en 2007 a perdu 3,2 %, contre 4,7 % pour celui parti en 1992. Pour un cadre, c’est pire encore : 7,9 % de perte pour celui parti en 2007, deux fois plus pour son homologue de 1992.

Ils auraient dû travailler plus longtemps ?

  • Merci, les enfants !

Les familles ayant eu le plus d’enfants sont celles qui pâtissent le moins de la baisse du niveau de vie entraînée par la fin de l’activité. Selon les calculs du COR, une famille sans enfants connaîtra, à la retraite, un niveau de vie équivalant à 97 % de celui qu’elle avait pendant sa vie active. Avec deux enfants, le chiffre monte à 118 %. Et, avec trois, bingo : 132 % ! Faites des gosses ? En réalité, les familles nombreuses ne sont pas, à la retraite, plus riches que les autres, mais leurs charges liées aux enfants baissent davantage.

Magie de la statistique !

  • Pensionnés en bonne santé

L’âge de départ a augmenté, la durée de cotisation aussi ! Résultat : la période de vie passée à la retraite a évolué depuis 2008, passant de vingt-deux ans et demi à vingt-trois ans pour les femmes, et d’un peu plus de dix-huit ans à près de dix-neuf ans pour les hommes. Dans le même temps, le nombre d’années de retraite « en bonne santé », c’est-à-dire sans « limitation d’activité modérée ou sévère » due à l’état de santé, s’est fortement accru — de deux ans, en moyenne. Désormais, les femmes retraitées sont en pleine forme pendant douze ans, et les hommes retraités pendant dix ans et demi.

Vivement la parité !


Hervé Martin. Le Canard Enchainé 21/09/2022


Une réflexion sur “Nouvelle, X-ième réforme des retraites

  1. christinenovalarue 24/09/2022 / 11:56

    Je propose de supprimer carrément les retraites. Les vieux n’ont qu’à vivre sur leurs économies, quoiqu’il leur en coûte. Non mais, c’est qui le chef ?

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