Jeux et enjeux olympiques

L’été est chaud, on le sait, et, dans le même temps, sportif également.

Macron ne dira pas le contraire, lui qui, avant de partir pour l’Afrique, est directement passé de l’arrivée du Tour de France à l’organisation des Jeux olympiques. Ces Jeux de Paris dont il souhaite faire un événement «inoubliable, surprenant et unique » ne s’ouvriront certes que dans deux ans, mais leurs défis et leur problématique collent déjà à la situation politique et économique du moment.

Dans l’hémicycle, notamment, où, là aussi, le climat est chaud et sportif. Pas seulement parce que les députés s’invectivent comme des supporters de foot énervés, allant même, pour certains, jusqu’à s’accuser de s’habiller comme eux pour se rendre à l’Assemblée.

Mais d’abord et surtout parce que, comme pour les Jeux olympiques, la compétition est rude et le budget fait gravement flamber les finances publiques.

Dans les deux cas, ça chauffe et ça claque !

Ainsi, dans la nuit de lundi à mardi, les compétiteurs de la majorité (relative) présidentielle, qui espéraient accélérer le pas et achever le marathon de la première lecture du projet loi de finances rectificative puis passer le relais au Sénat, n’y sont pas parvenus. Et, dans la foulée, après une âpre compétition, l’exécutif, qui avait prévu une enveloppe de 50 millions d’euros pour les ménages modestes se chauffant au fioul, a dû, après une alliance des oppositions, élargir la mesure, ce qui a fait monter la facture à 230 millions.

Tout cela48 heures à peine après avoir dû, sur un autre amendement, voté même par près de la moitié du parti d’Édouard Philippe, au grand dam de la Macronie, allonger 120 autres millions aux collectivités pour la revalorisation du RSA. Plus vite, plus haut, plus fort, les députés ont l’esprit et la forme olympiques !

« Ouvrons grand les Jeux » dit le slogan des JO de Paris, et, comme à l’Assemblée, il s’élargit à « ouvrons grand les caisses ! ». Les dérives et dépassements de budget sont, plus qu’un classique, presque une tradition dans l’organisation des JO. La Cour des comptes s’en est déjà émue dans un pré-rapport un rien alarmiste. Il faudra aussi prévoir une augmentation des coûts en matière de sécurité.

Et, dans ce climat politico-économique obéré par la guerre en Ukraine, des difficultés d’approvisionnement en matériaux de construction, une hausse des taux et une inflation pas loin de sprinter, la facture, comme celle de la loi Pouvoir d’achat, n’a pas fini de se muscler. Mais, le sportif Macron l’a promis-juré : « Il n’y aura pas d’impôt JO. Les Jeux doivent financer les Jeux. » Ses partenaires apprécieront.

Lors de ce qu’il a appelé « une réunion de chantier » des JO, pensant sans doute éviter que ladite réunion, comme à l’Assemblée, ne vire rapidement au chantier, Macron s’est gardé de convier la maire de Paris et la présidente de la région Ile-de-France, en d’autres termes Hidalgo et Pécresse, qui l’ont mal pris.

Là encore, aux JO comme au Parlement, le compromis et le dialogue avec les opposants censés fonder la « nouvelle méthode » augurent d’autres chauds et sportifs moments.


Erik Emptaz. Éditorial du « Canard Enchainé » 27/07/2022