Paris aux tuyaux percés

Coincée entre une dette vertigineuse et des recettes en baisse chronique…

… la Mairie de Paris s’apprête à sacrifier une partie d’un patrimoine historique et écologique unique en France : un Réseau d’Eau Non Potable (RENP) long de 1 660 km, inventé, en 1860, par l’ingénieur Eugène Belgrand pour nettoyer les égouts et les rues, arroser les jardins et alimenter les fontaines à moindres frais.

Début juin, le Conseil de Paris a approuvé un nouveau schéma directeur sur l’avenir de cette tuyauterie principalement alimentée par la flotte de la Seine et du canal de l’Ourcq.

Rinçage écolo

« Nous en conserverons la quasi-totalité », assure au « Canard » Dan Lert, l’adjoint EELV d’Hidalgo chargé de l’eau et de l’énergie. Drôle de « quasi-totalité » : le plan municipal prévoit, en vérité, la disparition d’environ 30 % du RENP — soit plus de 500 km de canalisations.

Cela fait déjà des années que, faute de travaux d’entretien suffisants et de crédits pour les remplacer, des tronçons vétustes sont débranchés en catimini. Cet abandon, qui remonte aux maires Chirac et Tiberi, a perduré sous Delanoê et Hidalgo.

La Ville s’était pourtant engagée à conserver et à développer ce réseau écolo. En 2015, l’équipe Hidalgo avait claironné qu’il serait sauvé dans son intégralité, et que la totalité des 2 700 « réservoirs de chasse » (dispositifs destinés à « rincer » les égouts) seraient remis en service. Les élus s’imaginaient même que l’eau non potable pourrait répondre à de nouveaux usages, comme l’alimentation des climatiseurs. Il n’est plus question de tout ça aujourd’hui…

Pour sa défense, la Mairie rappelle qu’elle a consacré 25 millions d’euros, entre 2015 et 2020, à l’entretien du RENP. En fait, cette somme a été tout juste suffisante pour changer… 1,16 % d’une tuyauterie dont l’âge moyen atteint désormais 120 ans ! Aujourd’hui, la municipalité annonce 36 millions d’euros d’investissements supplémentaires pour les années à venir.

A ce rythme d’escargot, une partie des installations pourraient bien finir par fêter leur bicentenaire…


Hervé Liffran Le Canard Enchainé. 29/06/2022


Une réflexion sur “Paris aux tuyaux percés

  1. jjbadeigtsorangefr 07/07/2022 / 21:40

    Nous sommes incapables d’entretenir la plupart des ouvrages que nos aïeux ont construits.
    Leur utilité n’est pourtant pas à démontrer.
    Du fric, il y en a.
    Rendons-lui son utilité en faisant les poches des accapareurs.

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