Des militaires en conflit avec le Président…

Pas de panique, cela se passe à Washington.

Soutenu par le Pentagone, le patron de l’arsenal nucléaire US s’en prend à Biden. À Paris, l’état-major des armées s’intéresse beaucoup à cette brutale confrontation quasi publique. Deux explications possibles à cette inquiétude, au choix : soit les chefs militaires français s’alarment bien trop de ces querelles entre le Pentagone et la Maison-Blanche, soit l’invasion de l’Ukraine a remis sur le tapis la défense des pays européens et des membres de l’Otan par leur parrain américain.

À en croire plusieurs généraux, il s’agit, en effet, de l’avenir de la dissuasion que peuvent exercer les États-Unis face à Poutine, lequel menace d’utiliser son armement nucléaire en Ukraine, voire en Europe. Autre crainte récurrente de ces inquiets : les dirigeants iraniens paraissent déterminés à se doter de « la bombe » en cas d’échec des actuelles négociations.

Merveilleux missiles

L’amiral Charles Richard, le grand patron de l’arsenal nucléaire américain (US Strategic Command), vient de déclencher les hostilités. Le 7 juin, il a écrit aux divers membres des commissions des forces armées au Congrès (toutes obédiences politiques confondues) pour les informer de ses intentions.

Sans mollir, il leur a annoncé (et les attachés militaires français en poste à Washington en ont informé l’état-major) qu’il allait s’opposer à l’équipe Biden, laquelle envisage de supprimer les crédits attribués au financement d’un merveilleux projet. A savoir : la mise en fabrication d’un missile à tête nucléaire destiné à équiper les sous-marins d’attaque de VUS Navy. Lesquels sont au nombre de 55, et chacun, sans son armement, vaut la bagatelle de 2,6 milliards de dollars.

« Supprimer ces missiles de croisière, a affirmé l’amiral Richard dans sa lettre au Congrès, est une décision dangereuse », et Adam Smith, l’un de sesinterlocuteurs, a renchéri. Président de la commission des forces armées de la Chambre des représentants, ce démocrate s’est engagé à s’opposer à toute initiative de Joe Biden en ce sens.

Petits champignons

Selon les explications fournies par l’amiral Richard aux élus américains, ces futurs missiles de croisière devraient emporter des charges nucléaires d’une puissance très inférieure (de 5 à 10 fois) à la bombe qui a détruit Hiroshima, en 1945. Pourvus de toutes les qualités, ils représentent une « option flexible », très souple d’emploi. Sous-entendu : on ne déclenche pas forcément un conflit nucléaire général en les utilisant. Et prière de le croire sur parole.

La guerre serait-elle plus jolie à regarder sur les écrans, avec ces petites bombes nucléaires et leurs petits champignons ? L’amiral Richard défend le rôle « modéré » que peuvent tenir ces armes « légères », en les comparant aux missiles intercontinentaux ou aux projectiles tirés par les sous-marins lanceurs d’engins et aux bombes à gravité B83 (entre 80 et 100 fois la puissance de la bombe de Hiroshima).

Ce n’est pas la première fois que ce patron de l’arsenal nucléaire veut influencer les décideurs de la Maison-Blanche. Trois mois auparavant (le 5 avril), reçu à huis clos à la Chambre des représentants, il avait qualifié la situation actuelle de « banalisation de la guerre nucléaire », et détaillé les efforts fournis par la Chine pour augmenter considérablement le nombre de ses missiles, de ses bombes, ainsi que ceux accomplis par la Russie. Cette dernière met au point des missiles de croisière balistiques et hypersoniques afin de répandre le feu nucléaire à 500 km, voire à 2 000, sans pouvoir être interceptés.


Claude Angeli. Le Canard Enchainé. 15/06/2022


2 réflexions sur “Des militaires en conflit avec le Président…

  1. bernarddominik 18/06/2022 / 14h08

    Ce sont des fous dangereux

  2. jjbadeigtsorangefr 18/06/2022 / 16h32

    Pas besoin du réchauffement climatique pour voir l’humanité disparaître………………

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