Olivier Faure dans ses souliers vernis
—- La rose est fanée —-
Il aime les pèlerines de bure et la route de Canossa. Il faut que ça gratte, que ça râcle, que ça fasse mal. Dès qu’il le peut, le premier secrétaire du PS monte en chaire et bat sa coulpe.
Expions, chers camarades, expions nos erreurs passées, nos traîtrises, notre lâcheté, notre culture de gouvernement, notre arrogance naturelle ! Les socialistes sont ostracisés par une partie de la gauche ? C’est leur très grande faute « Tout le monde veut nous tuer à gauche, nous avons voulu tuer tout le monde. » Gentil, maintenant, donne la papatte.
Certains au PS savent ce que gouverner veut dire ?
Un ton en dessous, s’il vous plaît : « On n’est pas « faits » pour gouverner : la gauche de gouvernement, c’est la gauche !» Son bras droit Pierre Jouvet, investi député de la Drôme, qui a mené les négociations avec LFI, pousse très loin l’autodénigrement : « Nous sommes des bourgeois de la politique, nous sommes devenus tellement des sociaux-démocrates responsables que nous sommes devenus chiants. »
C’est dans cette disposition d’esprit que l’équipe entourant Olivier Faure s’est rendue au QG de LFI — tout un symbole — pour le fameux accord électoral ratifié dans la douleur par les deux tiers du conseil national. Soixante-dix circonscriptions, dont une trentaine gagnables, ça en fait, des gars laissés sur le côté. Et, l’ennui, c’est que les proches du patron n’ont pas été les plus mal servis.
C’est le cas d’Olivier Faure lui-même, qui était menacé dans sa propre circonscription de Seine-et-Marne, de Pierre Jouvet, qui a pourtant eu, en 2017, des tentations macronistes, mais aussi de Laurent Baumel, bien servi en Indre-et-Loire, ou d’Arthur Delaporte, dans le Calvados.
Martine Aubry, une copine du patron, qui avait pris Olivier Faure dans son cabinet quand elle était au ministère de l’Emploi, a aussi placé son protégé Roger Vicot, maire de Lomme (Nord). Moyennant quoi la fille de Jacques Delors apporte un soutien, certes tiède, mais un soutien quand même, à l’accord PS-LFI, qui défie ouvertement l’Union européenne.
L’Hérault, où les socialistes sont encore forts mais pas trop Insoumis, n’obtient aucun candidat PS.
La Loire-Atlantique, sur la même ligne, un seul. Jean-Marc Ayrault, ex-maire de Nantes et ancien mentor d’Olivier Faure, a cessé d’appeler son poulain, qui ne le prend plus au téléphone. Les proches du sénateur Rachid Temal, opposé à l’accord, ne sont pas à la fête non plus.
Que pèse le PS aujourd’hui : 1,7 %, le score d’Anne Hidalgo à la présidentielle, ou 5-7 %, comme l’affirme Jean-Christophe Cambadélis, ancien patron du parti, qui invoque des sondages récents ?
« Ce n’est pas un accord électoral, c’est un acte de soumission. Mélenchon a utilisé le levier de la présidentielle pour tordre le bras à toute la gauche : les socialistes ont ergoté sur un mot par-ci, par-là, mais on ne leur a pas demandé leur avis. Nous n’avions nul besoin de signer cela, nous aurions eu plus de députés en négociant un simple accord de désistement au second tour. On va sortir de l’Otan, de l’OMC, on va entrer dans l’alliance bolivarienne, sérieux ? »
Un autre recalé s’insurge : « Nous n’étions pas pieds et poings liés face à Mélenchon, qui avait besoin de la caution du PS pour crédibiliser sa candidature à Matignon. Des munitions, nous en avions. »
La voix de son Maître
Devant ses proches, Faure n’a pas de mots assez durs pour les « anciens », surtout hollandais, qui n’ont pas su tendre la main et « dire clairement à quel espace nous appartenons ». Les anciens ne sont pas en reste : « Un type qui amène en quatre ans le parti à 1,7 % à la présidentielle, avec une candidate qu’il a imposée, ne songe même pas à partir, mais seulement à sauver sa peau et sa petite influence. Excusez-moi, mais Lionel, qui a démissionné, ça avait plus de gueule ! » réplique un ministre de Jospin.
Au-delà des bisbilles, le plus difficile va être de rétropédaler.
« Maintenant que Faure est entré dans cette logique, il va lui falloir partager le gâteau avec les Insoumis aux municipales et aux régionales. Le coffre-fort du PS, c’est ça, et Mélenchon, qui veut que son parti puisse lui survivre, le sait très bien », poursuit Cambadélis.
L’accord PS-LFI aurait dû être ratifié non par le conseil national, mais par les militants.
Faure n’était pas sûr de gagner, alors il a violé les statuts du parti. « Il prend même les méthodes de Mélenchon », s’agace un opposant.
Pour finir de convaincre les camarades réticents, Olivier Faure a convoqué l’Histoire, la signature du programme commun, en 1972, avec un PC en ligne directe avec le Kremlin. « Nous n’avons pas eu, alors, ces pudeurs de gazelle », a-t-il lancé, sans réaliser qu’il reprenait l’une des expressions favorites de Mélenchon.
Oups.
Anne-Sophie Mercier. Le Canard Enchainé. 11/05/2022

Difficile de se relever après un pareil bouillon. Mélenchon sait très bien que son programme est plein de contradictions, par exemple en annonçant que l’état ne remboursera que la dette légitime et demandant de supprimer la limitation du recours au crédit (qui prêtera à un gouvernement qui annonce qu’il se réserve le droit de ne pas rembourser ses dettes). Il n’ y aura probablement pas de majorité nupes, trop de français ont des doutes sur la possibilité d’appliquer son programme
L’essentiel reste d’empêcher Macron d’en faire à sa guise alors pas d’hésitation, même si le programme n’est pas parfait.
Au fait, vous avez lu les autres, ils sont parfaits pour vous plumer…