Avoir de l’entregent

Expression

Pendant les déplacements et les préparatifs le faucon était donc perché sur le poing ganté de cuir de son maître. Ce n’était pas une mince affaire que de l’habituer à circuler ainsi dans le brouhaha et l’agitation ambiante.

Bien sûr il était attaché par des « gets » lanières de cuir — et sa tête était enveloppée d’une coiffe, un chaperon également de cuir, qui l’empêchait de voir et que l’on ne lui ôtait qu’au moment de la chasse proprement dite, mais cela exigeait un dressage particulièrement constant de l’accoutumer ainsi à la fréquentation des hommes et des chevaux.

Un fauconnier du XIVᵉ siècle donne ces conseils précis : « Il vous continuer à le tenir souvent sur le poing et entre gent tant et si longuement que vous pourrez, le porter aux plaids et entre les gens aux églises et autres assemblées. »

Autrement dit, le volatile acquérait ainsi de l’« entregent »; il ne s’effarouchait plus de rien, à l’aise dans les situations les plus animées… Brave bête! « On l’appelait autrefois l’autour, cuisinier, parce que son maître le menait à la cuisine pour qu’il s’habitue à rencontrer beaucoup de monde, et du plus bruyant » (P.Vialar).

L’expression s’est appliquée aux hommes rompus à tous les usages mondains : « Le comte de Roucy avait, avec toute sa bêtise, un entregent de cour que l’usage du grand monde lui avait donné », rapporte Saint-Simon !

Bien sûr, pour faire son chemin dans les relations publiques, il vaut mieux s’attendre à tout et ne s’effaroucher de rien !


Claude Duneton. « La puce à l’oreille ».


Laisser un commentaire