Question : A-t-elle eu des réponses spécifiques fonction du support qui la questionne ? MC
L’Humanité réalise une série de rencontre-questions avec les candidats de gauche. Aujourd’hui : Christiane Taubira.
- Vous êtes régulièrement la cible de l’extrême droite. Marine Le Pen et Éric Zemmour, sans doute le candidat le plus révisionniste et le plus misogyne de toute l’histoire de la Ve République, sont tous les deux donnés autour de 15 %. Quel regard portez-vous sur cette situation ?
Le combat contre l’extrême droite est l’un des ressorts les plus puissants de mon engagement. Ce qui se passe en ce moment n’est pas tolérable. Le Pen et Zemmour ne participent pas à une discussion avec des visions théoriques et conceptuelles, mais à une agression caractérisée contre des millions de citoyens. Ils ont une perception fragmentaire de la société, faite d’exclusion et plus encore de haine.
Le risque est majeur : il n’est pas inconcevable que ces gens arrivent au pouvoir.
Et puis il y a une inquiétude récente : la candidate de la droite républicaine, Valérie Pécresse, en reprenant l’idée du « grand remplacement », fait la concession d’une approbation du vocabulaire de rejet et de peur, qui les conforte et les aide. […]
- Le favori des sondages est, pour l’instant, le président de la République sortant, Emmanuel Macron. Que pensez-vous de sa façon d’exercer le pouvoir ?
Ce n’est un secret pour personne, Macron joue l’omnipotence assumée. […] Son rapport au pouvoir est inquiétant et, manifestement, il ne conçoit ni la séparation des pouvoirs ni que le Parlement puisse en exercer un… […]
- Vous avez gagné la primaire populaire. Vous vous êtes présentée à la présidentielle pour proposer une solution de rassemblement à gauche, pour ne pas être « une candidate de plus ». Mais, pour l’heure, il n’y a pas de rassemblement, vous êtes autour de 3 % dans les sondages, et vous semblez à la peine dans la course aux parrainages. Pensez-vous pouvoir inverser la tendance ?
[…] Il faut moderniser les institutions, les faire respirer, ouvrir la parole. C’est le cœur de la bataille que je porte avec cohérence. […]
- Tous les partis de gauche affirment que Macron est le pire président de la Ve République et que sa réélection serait une catastrophe, mais tous partent séparés au motif que les conditions ne sont pas réunies…
C’est irresponsable et dangereux. […] Dix millions de personnes vivent désormais sous le seuil de pauvreté. Macron, lui, fustige le « pognon de dingue » des aides sociales et s’est dit qu’il allait prendre 5 euros par mois sur les APL. Cela montre son rapport à la pauvreté et à la solidarité. […]
- Croyez-vous que la gauche va dans le mur ?
[…] Les candidats de cette famille politique [une partie – MC] mesurent leurs espaces d’influence, les yeux fixés sur les sondages, sans penser à leur rôle et leur responsabilité. Moi, je veux rassembler pour agir, pour convoquer une conférence salariale avec les partenaires sociaux, augmenter le Smic à 1 400 euros net, permettre d’avoir une retraite digne et à temps pour les travailleurs… Ce ne sont pas les combats qui manquent.
- Quelles sont les réformes qui vous tiennent le plus à cœur ?
D’abord protéger la jeune génération et apporter des réponses aux 800 000 jeunes en décrochage. Je réformerai l’université en mettant des pôles d’excellence pour ne plus créer de clivage avec les grandes écoles. Je supprimerai Parcoursup, mettrai en place un revenu étudiant, bâtirai un capital de projet plafonné à 20 000 euros et une agence des jeunesse de France.
Le deuxième axe, c’est le pouvoir de vivre, avec la question des salaires, des retraites, l’égalité sociale. Plus de 500 personnes sont mortes d’un accident du travail l’an dernier. C’est bien qu’il y a un problème. J’augmenterai de 30 % le RSA et je ferai en sorte que l’APL prenne en compte le loyer et les charges, faute de quoi trop souvent les gens tombent dans la pauvreté.
Le troisième axe, c’est bien sûr la transition climatique qui doit s’allier à la justice sociale. Cela se traduit par le financement jusqu’à 80 % des rénovations des passoires thermiques. Des gens sont mal chauffés l’hiver, mal isolés l’été et doivent choisir entre se chauffer et manger.
Les gens modestes sont au niveau des exigences de la COP21 : pour éviter de dépasser les 1,5 °C de réchauffement, ils doivent se limiter à 5 tonnes d’émission de CO2. Or, ils respectent déjà cet objectif. Le réchauffement de la planète, ce n’est pas eux.
- Sur l’héritage, proposez-vous d’augmenter l’impôt pour les plus riches ?
Il s’agit d’agir sur le droit des successions en remettant de la progressivité. Avec les niches fiscales réservées aux plus riches, plus le patrimoine augmente et plus l’impôt devient dégressif ! Là où il devrait être fiscalisé à 45 %, il l’est à 10 %. Avec moi, je peux vous dire que les plus riches vont payer 45 % et que cela va rapporter des milliards d’euros à l’État.
[…]
- Qu’a-t-on fait en Ukraine depuis les accords de Minsk en 2014 ?
Sur l’Otan, la France n’a pendant longtemps, jusqu’à Nicolas Sarkozy, pas été membre de son commandement intégré. Et l’épisode de la guerre en Irak montre que l’on peut rester membre de l’Otan, tout en ayant une position différente de celle des États-Unis.
- Quelle place donner aux associations ?
Le monde associatif est un univers [qui] occupe une fonction de lien social, […] [qui] agissent sur ce thème, comme dans le sport, et plus encore. Les associations permettent à des personnes de se soucier des autres, et l’on sait bien l’importance […] du lien aujourd’hui. Il faut soutenir les libertés associatives et leur place dans la société, c’est une question de citoyenneté.
- Souhaitez-vous supprimer le contrat d’engagement républicain instauré par Macron ?
Il y a des situations dans lesquelles l’État doit mettre son nez, même quand des associations ne disposent pas de fonds publics. Nous sommes dans un État de droit, et une structure autonome ne peut s’affranchir de la loi. Certaines associations font du prosélytisme dans le domaine métareligieux. Mais nous avons déjà les instruments juridiques pour lutter contre.
Le contrat d’engagement républicain ne vient pas combler des manques, mais apporte une réponse doctrinale et idéologique à un sujet réel. Il englobe l’ensemble de l’univers associatif dans une suspicion, un rapport de défiance, au lieu d’aiguiser les instruments qui permettraient de repérer et sanctionner les associations qui contreviennent à la loi.
[…]
Aurélien Soucheyre, Naïm Sakhi. L’Humanité. Apparemment Lecture libre. Source(Extraits)
La page sur le Donbass ne s’affiche pas. J’espère que ce n’est pas une censure.
Pour Taubira je ne suis pas sur de son positionnement
Taubira parie sur la personne, Roussel sur le PROGRAMME.