Chasse : la mort de trop ?

Samedi 19 février 2022, le tir d’une chasseuse de 17 ans a été fatal à une randonneuse de 25 ans qui se baladait avec son compagnon sur les sentiers de randonnées du Cantal, entre Aveyron et Auvergne.

Depuis, le débat sur la légitimité de la chasse le week-end est relancé et va s’inviter, disent déjà les médias, dans la campagne présidentielle. […]

C’est « un drame », « une balle perdue », « un accident comme il ne devrait plus en avoir ». Les commentaires sont unanimes, à Almont-les-Junies le village aveyronnais où vivait la jeune randonneuse, comme à la Fédération départementale des chasseurs. […]

[…] Bérangère Abba, secrétaire d’État chargée de la biodiversité : « Il y a la question de l’expérience », a-t-elle déclaré à l’AFP, en précisant que la chasseuse avait obtenu son permis à 16 ans. Autant dire que de telles déclarations ne règlent rien à la dangerosité intrinsèque du « sport » favori de ceux qui se définissent comme les premiers écologistes de France. […]

Malgré l’opposition croissante des citoyens à la chasse, malgré les pétitions pour en limiter l’usage, les chasseurs demeurent toujours les maîtres des campagnes de l’automne au printemps.

[…] … la réaction de Willy Schraen, le président de la Fédération nationale des chasseurs (FNC), qui évoque sa « tristesse » avant d’expliquer que « toutes les fédérations de chasseurs » sont en train d’être contactées « pour qu’il soit rappelé l’ensemble des règles de sécurité ».

Le voir faire profil bas est le signe que la situation est grave au regard de l’opinion publique. La mort de la jeune randonneuse pourrait bien être la mort de trop, à l’instar de ce qui s’est passé avec la sécurité routière lorsque les faits divers impliquant des chauffards sont devenus des faits de société puis des politiques publiques.

Aujourd’hui donc, devant les dégâts faits par les fans de la gâchette, le fort en gueule Schraen fait profil bas. Ça nous change un peu de ses déclarations tonitruantes, comme lorsqu’il pérorait sur France 3, en décembre 2020. […]

 Avec le drame de samedi, fini les envolées imagées de Willy le tirailleur. Place à la compréhension, la peine immense, la compassion. Et au rappel des règles élémentaires mais trop peu respectées de la chasse. […]

[…]… l’énorme problème de la chasse d’aujourd’hui : l’arsenal quasi militaire utilisé pour tuer au mieux un sanglier, au pire un lapin. D’ailleurs, il suffit de feuilleter l’inénarrable magazine Le chasseur français ou bien de cliquer sur les onglets de chassons.com pour voir avec quelle délectation les chasseurs ont troqué la chevrotine pour des balles capables de pulvériser un éléphant.

L’Association de protection des animaux sauvages qui milite notamment pour une réglementation bien plus sévère de la chasse alerte sur la dangerosité des armes de chasse. « Globalement, deux types d’armes sont autorisés pour la chasse : les fusils à canons lisses sont utilisés pour le petit gibier avec des cartouches à balles ou à grenaille (plombs de chasse). Ils sont dangereux jusqu’à 1,5 km. Les carabines à canons rayés servent au tir à balles du gros gibier. Elles restent dangereuses dans un rayon de 3 km autour du tireur, alors qu’elles ne sont précises qu’à 300 mètres en moyenne ». Des armes de plus en plus perfectionnées et puissantes.

Sous la présidence Macron, les chasseurs ont obtenu l’intégration de silencieux à leurs armes. L’actuel président n’aura eu de cesse durant son mandat de bichonner les chasseurs comme rarement auparavant. […] Notons encore en vrac : le pouvoir renforcé des fédérations de chasse, la division par deux du prix du permis national, les dérogations au droit commun durant les confinements et la fort judicieuse prolongation de la chasse aux sangliers jusqu’au 31 mars.

Randonneurs, vous voilà prévenus…


Natacha Devanda. Charlie Hebdo Web – Source (Extraits)


3 réflexions sur “Chasse : la mort de trop ?

  1. jjbadeigtsorangefr 22/02/2022 / 09:30

    Triste événement que cette mort d’une randonneuse qui pose le problème de la cohabitation dans la nature par ses différents utilisateurs. La réglementation ne remplacera jamais l’éducation des utilisateurs sur le partage de l’espace. Je pense également à cette jeune femme qui a donné la mort sans intention de la donner, chose qu’elle ne pourra jamais effacer.

  2. bernarddominik 22/02/2022 / 10:54

    Macron à baissé le prix du permis de chasse histoire de la rendre plus accessible, selon lui une action sociale, on aurait préféré qu’il baisse les taxes sur l’eau au lieu de les augmenter, l’eau donne la vie, la chasse l’enlève. Triste histoire qui montre que confier aux eaux et forêts la protection des espaces non cultivés est sûrement mieux que passer par les chasseurs

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