Alors, cette guerre en Ukraine, ça vient ?
Depuis des semaines, le monde a les yeux rivés sur cette région et se demande si Poutine franchira le Rubicon. Pour quelle raison le chef du Kremlin se risquerait-il à envahir ce pays?
Peut-être pour ses ressources, mais plus probablement pour éloigner l’Otan de ses frontières. Mais en quoi l’Otan en Ukraine menacerait-elle la Russie ? En fait, ce qui fait peur à Poutine, c’est l’Occident. Pas seulement à travers une organisation militaire comme l’Otan, mais aussi par sa culture, sa mentalité et ses moeurs. Poutine craint de voir ce pays voisin lui tourner le dos pour se diriger, politiquement et intellectuellement, vers l’Ouest. Un système politique n’étend pas sa sphère d’influence uniquement en déployant des troupes, mais également en diffusant son modèle de pensée.
En 2013, Poutine avait promulgué une loi qui punissait la « propagande homosexuelle », et, en novembre dernier, une chaîne musicale russe a été condamnée pour cette infraction à 1 million de roubles, d’amende. Ce dont la Russie a peur, c’est moins des chars de l’Otan que des valeurs libérales de l’Ouest.
Ce qui démontre une fois de plus qu’une guerre à coups de bombes et de missiles est d’abord une guerre culturelle. Et Poutine, ancien officier du KGB, est un produit culturel de l’Union soviétique qui n’est jamais parvenu à se libérer du moule qui l’avait formaté, et qui vit dans le souvenir de la grandeur passée de ce système politique.
Poutine est un danger public car c’est un nostalgique. Et il n’y a pas plus dangereux que la nostalgie. Napoléon s’est fait sacrer comme un empereur romain, Mussolini voulait imiter la grandeur de Rome, et Daech fit rétablir le califat avec son chef Abou Bakr al-Baghdadi, autoproclamé « calife et successeur de Mahomet ».
Quant à Éric Zemmour, simple candidat à la présidentielle pour le moment, il rêve de remettre sur le trône la dynastie des rois capétiens, de reconquérir l’Algérie et de faire renaître l’ORTF, avec Thierry la Fronde à 19 h 30. On a la nostalgie qu’on peut.
Finalement, on s’aperçoit que beaucoup de grands hommes de l’Histoire n’avaient pour ambition que de rénover des vieilleries passées. Les despotes se révèlent être de tristes emmerdeurs sans imagination.
Ce qui est embêtant, c’est que les envies de restauration de l’ex-URSS qui bercèrent Poutine cohabitent avec celles, presque identiques, du maître de la Chine, Xi Jinping, qui rejette aussi les valeurs occidentales. Et qui aimerait bien récupérer Taïwan, comme Poutine l’Ukraine.
Ajoutez les Américains qui ont encore en tête le slogan de Trump « Make America Great Again », et vous avez un cocktail explosif de nationalismes, de patriotismes et d’idéologies, idéal pour un beau feu d’artifice.
En politique, la nostalgie est un danger mortel. À la fin de sa vie, le général Salan, chef des généraux putschistes d’Alger, continuait de se définir comme un soldat « de la coloniale » à une époque où les colonies n’existaient plus.
Son adversaire, le général de Gaulle, avait une vision diamétralement opposée quand il déclarait à la télévision française, le 14 juin 1960: « Il est tout à fait naturel que l’on ressente la nostalgie de ce qui était l’Empire, comme on peut regretter la douceur des lampes à huile, la splendeur de la marine à voile, le charme du temps des équipages. Mais, quoi? ll n’y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités ».
On appréciera le ton sarcastique de l’auteur de ces mots qu’on pourrait aujourd’hui opposer avec la même pertinence à Poutine ou à Xi Jinping.
Ces deux-là sont aussi dangereux que Salan avec sa nostalgie des colonies. Mais eux ont sous leurs ordres 2 millions de soldats chinois et 760 000 soldats russes. Jamais la nostalgie n’a été aussi puissante et mortelle.
RISS – Edito – Charlie Hebdo, 26/01/2022
Le vrai problème, c’est que l’OTAN n’a pas respecté l’accord signé avec Gorbatchev qui en échange de la réunification allemande arrêtait là la progression de l’OTAN.
Or depuis la Pologne, Tchéquie, Slovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie et les 3 pays baltes ont rejoint l’OTAN, et la Géorgie et l’Ukraine sont candidates pour la rejoindre.
On comprends que la Russie se sente cernée par cette alliance « orientée » contre elle.
L’OTAN n’a pas respecté sa signature, il n’y a pas à chercher des craintes de Poutine qui sait qu’il va bientôt devoir laisser sa place.
N’oublions pas que le capitalisme a toujours réglé ses problèmes par la guerre.
La bombe atomique fait peur mais il peut toujours y avoir un abruti qui appuie sur le bouton rouge…