La pédiatrie hospitalière en soins intensifs

Cet automne, l’épidémie de bronchiolite, arrivée plus tôt, s’est aussi révélée plus intense.

Aux bébés de moins de 2 ans ayant besoin d’oxygène et, parfois, d’un passage en réa s’ajoutent des préados admis à la suite d’une tentative de suicide – certains dès 8 ans.

Au cours de la dernière semaine de septembre (donnée la plus récente connue), près de 150 jeunes de moins de 15 ans ont été reçus aux urgences pour des gestes suicidaires — soit 50 de plus qu’en 2019 à la même période, indique Santé publique France (22/11).

Le bloc débloque

« Les urgences savent prendre en charge les intoxications médicamenteuses mais pas les troubles somatiques. C’est angoissant pour les enfants, les parents et les infirmières chargées de les surveiller dans des chambres inadaptées ! » détaille Isabelle Desguerre.

Le diagnostic est immuable : il manque des infirmières, donc des places d’accueil. L’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France a demandé à Necker de bloquer 12 lits pour la bronchiolite, en plus des 12 déjà prévus.

La solution ? Fermer ceux de l’ambulatoire (en journée). Et gare aux petits casse-cou qui se fractureraient le bras !

En novembre, lors d’une conférence sur la thérapie génique, le téléphone du chef de neuro-pédiatrie du CHU de Strasbourg a sonné : six lits

Supplémentaires étaient condamnés. Joli symbole pour l’expert de la « médecine du futur » !

L’élargissement du « plan blanc » (concentration sur les activités vitales), annoncé le 9 décembre par Olivier Véran, a poussé le CHU de Nantes à déprogrammer la plupart des opérations de chirurgie infantile pour redéployer les infirmières du bloc en pédiatrie. Mais ça ne suffit pas encore.

A Seclin, quand l’oxygène vient à manquer, les urgences pédiatriques tentent de transférer les petits malades à Lille, à Roubaix ou à Douai. Mais, à Douai, le service concerné est lui-même partiellement fermé depuis le 15 septembre…

Tri et chuchotements

Dans ces conditions, les hôpitaux se transforment en centres de tri. N’en déplaise à Brigitte Bourguignon, la ministre déléguée à l’Autonomie, qui, le 28 octobre au Sénat, assurait le contraire. « On prend des risques en permanence, explique Isabelle Des-guerre. On renvoie chez eux des enfants qui sont « limite » et on fait peser une responsabilité terrible sur les parents, chargés de les surveiller. »

A Nice, un pédiatre confesse avoir congédié un malade souffrant de bronchiolite, pour le voir revenir 48 heures plus tard dans un état grave. Les urgences nantaises aiguillent les parents vers la pédiatrie libérale… elle aussi désertifiée. « L’âge moyen des pédiatres libéraux laisse présager une aggravation de la situation puisque 44 % d’entre eux ont plus de 60 ans », alerte un rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (Igas) publié en mai.

La réforme du financement des urgences hospitalières, effective le 1er janvier 2022, réanimera-t-elle la pédiatrie ? Rien n’est moins sûr. Conduite par la Direction générale de l’offre de soins, elle a été menée sans l’avis des pédiatres, alors que 30 % des arrivées aux urgences concernent des enfants (« Le Monde », 18/10).

Selon ces toubibs, cette réforme risque de pénaliser les moins de 16 ans et de peser sur ce secteur — en pleine crise d’ado.


Fanny Ruz-Guindos – Le Canard Enchainé – 15/12/2021


2 réflexions sur “La pédiatrie hospitalière en soins intensifs

  1. christinenovalarue 20/12/2021 / 7h56

    Le gouvernement a la solution miracle : vacciner les enfants… contre la connerie des adultes !

    • Libres jugements 20/12/2021 / 12h20

      Bravo Christine et merci pour ce cri du coeur !
      Cordialement
      Michel

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