Le colonialisme français «de» Nouvelle-Calédonie.

Une interview de Charles Wea, envoyé du FLNKS à l’ONU. Nous ne reconnaissons pas le résultat de ce référendum, qui est un référendum bidon. Nous sommes satisfaits de voir que la participation dépasse à peine les 40 %, ce qui montre que le mot d’ordre du FNLKS de participer à ce scrutin a été très bien suivi.

Cette satisfaction s’accompagne du fait que le peuple kanak a été humilié par l’État français, qui a maintenu cette date du 12 décembre 2021, en dépit des demandes de le repousser à septembre 2022. Une décision allant à l’encontre de la promesse initiale de tenir ce référendum avant septembre 2021 ou après juillet 2022, pour ne pas interférer avec la campagne présidentielle, et incompatible avec la situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie, qui est toujours confinée.

Nous n’avons pas été pris en considération dans le cadre du processus du décolonisation mis en œuvre par l’État français et il est insensé d’avoir tenu un tel référendum sans le peuple colonisé. L’avenir de la Nouvelle-Calédonie ne peut pas se faire sans les Kanak. Même si aujourd’hui la droite calédonienne dit que c’est fini, que le troisième référendum règle la question, et que le président de la République embraye sur la droite locale en disant « la Nouvelle-Calédonie restera française », c’est faux. 

Comment expliquez-vous ce changement de pied de l’État, qui semblait, depuis les accords de Nouméa, sensible à marcher du même pas avec les indépendantistes ?

Nous avons senti un changement de méthode avec l’arrivée du nouveau premier ministre Jean Castex, et surtout celle de Monsieur Lecornu au ministère des outre-mer. Le comité des signataires, qui se réunissait régulièrement pour accompagner la mise en œuvre des accords de Nouméa, a été mis en sommeil. On a senti chez lui une stratégie consistant à tourner la page de l’indépendance avant l’élection présidentielle française. Et cela en dépit du précédent de 1988, où Jacques Chirac avait voulu instrumentaliser le dossier de la Nouvelle-Calédonie dans le cadre de l’élection présidentielle, ce qui avait mené au drame d’Ouvéa.  

Plus structurellement, la France est en train de changer de cap et de reconstruire sa diplomatie pour maintenir sa présence dans le cadre indo-pacifique, surtout après l’affaire des sous-marins et le conflit avec l’Australie. Maintenir la Nouvelle-Calédonie dans l’orbite de la France est, dans ce cadre, essentiel. Nous sommes captifs d’une géopolitique globale et d’une restructuration diplomatique plus générale.


Joseph Confavreux. Médiapart. Titre original : « Charles Wea, du FLNKS : « Nous ne négocierons plus avec ce gouvernement » ». Source (Courts extraits)


Macron se réjouit

L’archipel du Pacifique reste dans le giron français, malgré un processus de décolonisation enclenché par les accords de Matignon en 1988, et renforcé par ceux de Nouméa en 1998. Pour les indépendantistes, la pilule est amère : « Il faut que le ministre Lecornu se rende compte qu’il a fait une bêtise, une grosse erreur », a réagi Gilbert Tyuienon, maire de Canala (UC-FLNKS) et porte-parole du gouvernement à majorité indépendantiste. Quant à Roch Wamytan, le président (UC-FLNKS) du Congrès de Nouvelle-Calédonie, il a précisé depuis Paris, où il mène une délégation indépendantiste, que « ce référendum n’est pas le troisième référendum ; c’est celui de l’État français, pas le nôtre ».

Emmanuel Macron s’est exprimé dans la foulée de l’annonce des résultats, pour se féliciter lui aussi de ce que « la France est plus belle, car la Nouvelle-Calédonie a décidé d’y rester », tout en pointant un « contexte de forte abstention ».

Mais alors que l’archipel s’apprête à faire un saut dans le vide, le comportement et la prise de position du gouvernement vont laisser des traces. Car les raisons de cette non-participation des indépendantistes tenaient autant à la crise sanitaire et au deuil kanak qu’à l’attitude de l’État, qui est sorti de sa neutralité en prenant ouvertement position contre l’indépendance.

« L’État n’est plus arbitre »

C’est d’ailleurs le sens du message porté devant les Nations unies par une délégation du FLNKS, menée par Roch Wamytan, pour dénoncer un « référendum n’ayant aucune légitimité ».

Pour l’ONU, la Nouvelle-Calédonie reste classée comme « territoire à décoloniser ». Et c’est tout l’enjeu de la période qui s’ouvre, alors que l’État a fait la preuve de sa volonté de revenir sur cet engagement.

Le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, a fait part de sa volonté d’ouvrir des discussions pour parler de l’avenir de l’archipel. Les accords de Nouméa prévoyaient de nouvelles discussions pour élaborer un nouveau statut après les référendums. Mais, entre un camp anti-indépendantiste qui estime que cette question de l’indépendance est réglée une fois pour toutes et un FLNKS qui refuse de parler avec ce gouvernement et indique qu’il se rendra « à la table des négociations pour discuter de l’indépendance et pas d’autre chose », la situation semble bloquée. Et par là même dangereuse.


Benjamin König. Source (extraits)


Une réflexion sur “Le colonialisme français «de» Nouvelle-Calédonie.

  1. bernarddominik 14/12/2021 / 08:29

    Les kanaks n’ont pas à faire les frais des lubies de Macron.
    Ce référendum est une farce qui ne respecte pas les droits du peuple kanak.
    Médiapart à révélé une lettre de Pierre Messmer ancien ministre qui montre le fond de la politique colonialiste de nos gouvernants.
    Les cris de victoire de Macron face à cette farce montrent bien que Macron n’est ni républicain ni démocrate car il ne respecte ni les règles de l’une ni les principes de l’autre.
    C’est un roitelet mégalomane

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